Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, Poutine : 1, Europe : 0, Ukraine : - 1. En ce temps d’Euro 2016, on pourrait ainsi résumer l’esprit de cette résolution, qui m’afflige. Si, par malheur, le gouvernement français devait la suivre – mais j’ai cru comprendre avec plaisir, monsieur le secrétaire d’État, que vous faisiez preuve d’une certaine fermeté en la matière –, ce serait la victoire de Poutine. Comme tous les autocrates et les colonels du KGB, celui-ci sait qu’avec les démocraties il suffit d’attendre ; elles cèdent toujours les premières.
Cette résolution, c’est le drapeau blanc qu’il attend depuis deux ans. Pourtant, qu’est-ce qui, pendant cette période, a changé qui justifierait un changement de notre position ? Rien sur le terrain, au contraire ; les dernières semaines ont ainsi été en Ukraine les plus meurtrières de ces derniers mois. Les prorusses du Donbass et du Donetsk se sont renforcés, avec l’appui des Russes. Qu’est-ce qui a changé en Ukraine, qu’est-ce qui a changé en Crimée, qu’est-ce qui a changé en Abkhazie, en Ossétie, en Transnistrie, au Haut-Karabagh ? Qu’est-ce qui a changé en Syrie, où Poutine bombarde ceux que nous soutenons et épargne l’État islamique ?
Dans ces conditions, je ne comprends pas pour quelle raison il faudrait changer notre position. Était-elle belliqueuse ? Au contraire ! Lors de l’invasion de l’Ukraine, le couple franco-allemand a répondu en cherchant désespérément une négociation, qui a débouché sur les accords de Minsk. Personne ici ne les a contestés ; tout le monde – majorité comme opposition – les a soutenus. Qu’est-ce qui peut justifier qu’aujourd’hui on nous propose de les modifier ?
Les auteurs de la résolution sont d’ailleurs d’accord avec moi sur ce point. Ainsi, l’exposé des motifs indique ceci : « La France et l’Allemagne ont joué un rôle décisif dans la conclusion des accords de Minsk. Ceux-ci constituent une feuille de route à laquelle il faut se tenir […]. Y renoncer, ne serait-ce que partiellement, serait un très mauvais signal adressé aux protagonistes sur le terrain. »