Intervention de Gaëtan Gorce

Réunion du 13 juin 2016 à 22h45
Nouvelles libertés et nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s — Article 1er

Photo de Gaëtan GorceGaëtan Gorce :

J’essaie de comprendre la logique qui nous amène à discuter d’un tel texte.

J’ai évoqué précédemment l’enjeu de l’emploi, mais je n’ai pas vu le rapport immédiat, bien que ce soit la priorité de nos concitoyens. D’autres priorités peuvent évidemment être envisagées eu égard à l’évolution du monde du travail. Je ne parle pas de « l’ubérisation », dont on nous rebat les oreilles.

La part des emplois correspondant à ce modèle progresse peut-être relativement vite, mais pour un volume qui reste extrêmement limité. Si la perspective est de considérer que nous vivrons une ubérisation du monde du travail – c’est une perspective qu’il vaut mieux éviter ! –, force est de constater qu’elle n’est pas très crédible à l’horizon que nous pouvons nous fixer. En tout cas, elle ne correspond pas à l’évolution, y compris aux États-Unis, d’après ce que l’on peut observer.

Est-ce, d’une certaine manière, la progression de la précarité ? C’est la situation à laquelle on assiste de manière systématique : on nous dit que notre marché du travail manque de flexibilité. Mais on constate au contraire que le recours aux contrats atypiques, aux temps partiels subis et même maintenant au détournement très systématique du statut d’auto-entrepreneur – j’ai de nombreux exemples en tête, je pourrais éventuellement vous les fournir – progresse. On peut alors imaginer que notre priorité serait peut-être de freiner un tel mouvement.

Mais s’il s’agit de se placer dans une perspective, alors tournons-nous vers les véritables enjeux du monde du travail.

Le premier d’entre eux concerne la transformation des métiers au regard de l’évolution des techniques et de la modification de l’organisation du travail. Voilà un sujet qui devrait occuper notre gouvernement et notre majorité, en vue d’essayer d’adapter des solutions. Tel est le sens de notre proposition ; d’autres viendront en discussion ultérieurement.

Nous risquons de rendre obsolète toute une série de compétences dans de très nombreuses entreprises du fait de l’évolution des techniques et des savoir-faire avec l’arrivée du numérique. Malgré un certain nombre de dispositifs existants, les entreprises ne prennent malheureusement pas ce sujet à bras-le-corps, et les branches professionnelles le font encore moins encore. Or c’est pourtant ce qu’elles devraient faire.

De la même manière – ces deux problèmes sont très voisins –, nous connaissons une vraie difficulté dans notre économie du fait de l’insuffisante qualification de nos salariés. Le niveau de formation de nos actifs est inférieur à celui qui existe dans d’autres pays européens, à commencer par l’Allemagne. Cela explique nos difficultés.

Ce texte semble être bâti sur l’idée selon laquelle le code du travail, les lois relatives au travail, le coût du travail – on l’a vu avec le CICE – seraient à l’origine de toutes nos difficultés. Mais la vérité, c’est que nous ne créons pas assez de valeur ajoutée ; nos salariés ne sont pas assez formés ; l’obligation d’adaptation mise à la charge des entreprises n’est pas suffisamment mise en œuvre, et nous n’avons pas de dynamique.

Si nous voulons avoir une action offensive en faveur de l’emploi, il faut pousser à la négociation en ces domaines. Mais il faut que l’État y mette tous ses moyens pour faire en sorte que celle-ci aboutisse.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion