Madame la secrétaire d’État, le rapport d’étape de la mission commune d’information sur la prise en charge de la dépendance et la création du cinquième risque souligne que près de 80 % des personnes hébergées en institution disposent d’un revenu inférieur au coût de leur séjour.
Déjà dans l’Aisne, un phénomène inquiétant apparaît : certaines personnes âgées, pour des raisons financières, renoncent à entrer en établissement et certains lits sont désormais inoccupés.
Selon les projections de l’INSEE, la progression du nombre de personnes âgées dépendantes devrait connaître un premier pic d’ici à 2012, c’est-à-dire demain.
Que vont devenir ces personnes ? Nombreuses sont celles qui ne disposeront pas des moyens nécessaires pour financer leur hébergement en établissement spécialisé. Comment la société les prendra-t-elle alors en charge ?
Quel niveau d’équipement et de protection sociale la société sera-t-elle en mesure d’apporter à cette population ?
Aborder la question de la tarification, c’est aborder ce sujet majeur du service public, de la relation à l’usager et à l’humain, de la prise en charge collective que nous sommes en mesure d’apporter à nos aînés.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 prévoit que, dès le 1er janvier 2010, les tarifs d’hébergement fixés par le président du conseil général ne seront opposables qu’aux bénéficiaires de l’aide sociale.
Pour les autres résidents, le tarif à l’entrée en établissement sera fixé librement par le gestionnaire et augmentera ensuite annuellement en appliquant un taux d’évolution arrêté par le ministre chargé de l’économie et des finances.
Le Gouvernement a proposé un premier projet de décret d’application qui a suscité de très vives réactions. Ce premier projet a été retiré.
Si l’on ne peut qu’être d’accord avec la volonté d’atténuer les prix de journée, volonté qui anime bien votre projet de décret, la lecture de ce nouveau texte ravive l’inquiétude sur les conséquences et les incidences qui en découlent.
La question du coût réel des charges de fonctionnement et de leur financement reste posée ; ces coûts dépasseront vraisemblablement les enveloppes forfaitaires du soin et de la dépendance que vous avancez et se répercuteront inévitablement sur la section hébergement. La convergence tarifaire que vous proposez pourrait aussi accentuer cette tendance.
Comme ni les conseils généraux ni les résidents ne peuvent à eux seuls supporter cette prise en charge, quels moyens seront alors mis en œuvre ?
Dans le nouveau projet de décret, le président du conseil général fixe un prix de journée « au seul flux des nouveaux entrants ». Comment ne pas s’inquiéter de cette inégalité de traitement entre les anciens et les nouveaux résidents ? Ne faut-il pas y voir une sélection des personnes âgées à l’entrée en établissement ?
Cette limite entendue, la question de la nécessaire modernisation des établissements reste posée, sachant que tout investissement est répercuté sur le prix de l’hébergement. Ne faut-il pas craindre un frein au développement d’un hébergement de qualité ?
Madame la secrétaire d’État, des enjeux fondamentaux de politique sociale sont posés par cette question de la tarification, enjeux humains, enjeux financiers, enjeux économiques.
Les conséquences de sa mise en œuvre peuvent être dramatiques pour bon nombre de personnes âgées dont les revenus ne dépassent pas le minimum vieillesse. Elles concernent tout autant leurs obligés alimentaires. Ces conséquences seront d’autant plus dramatiques dans le contexte de crise et de restriction budgétaire que nous connaissons.
Nous nous devons de les aborder avec responsabilité
Dans cette perspective, madame la secrétaire d’État, quelle est exactement l’intention du Gouvernement en matière de tarification des établissements ?