Intervention de Myriam El Khomri

Réunion du 14 juin 2016 à 14h30
Nouvelles libertés et nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s — Article 1er

Myriam El Khomri, ministre :

Monsieur Durain, vous vous inquiétez à juste titre du dumping social, notamment dans le cadre des pratiques européennes et internationales de nos entreprises. En cohérence avec mes déclarations antérieures, je réitère mon opposition à l’assignation d’objectifs à la commission d’experts. Ce n’est pas à elle de faire évoluer le droit du travail. C’est pourquoi l’avis du Gouvernement sur cet amendement sera défavorable.

Vous soulevez néanmoins deux sujets majeurs autour de la question du dumping social. Le premier est le devoir de vigilance des entreprises donneuses d’ordre, qui fait l’objet de la proposition de loi de Dominique Potier que vous avez citée.

Ce principe n’a de sens que si nous sommes en capacité de le mettre en œuvre de manière internationale et, d’abord, à l’échelon européen. J’ai expliqué la semaine dernière à l’Organisation internationale du travail, l’OIT, combien ces plans de vigilance sont importants. Un grand mouvement est nécessaire sur cette question : j’y tiens à l’extrême et le travail que nous avons eu à Genève avec les organisations syndicales et patronales était particulièrement intéressant dans cette perspective.

La lutte contre les fraudes au détachement constitue le second sujet majeur. Le Gouvernement français est en pointe aujourd’hui pour demander la révision ciblée de la directive du 16 décembre 1996 sur le détachement de travailleurs. Nous entendons faire inscrire dans le droit européen le principe « à travail égal, salaire égal sur un même lieu de travail ». Il nous importe en particulier que ce soit le salaire de la convention collective qui s'applique alors.

Or si nous prenons aujourd’hui cette initiative européenne, c’est bien parce qu’il existe des pratiques de dumping social et que l’érosion de notre modèle social est en jeu. Ce n’est pas le travail détaché lui-même qui pose problème : la France est en Europe le troisième pays d’envoi de travailleurs détachés et la libre circulation des travailleurs dans l’espace européen représente bien sûr un atout pour nos entreprises, pour ces salariés, mais aussi pour nos étudiants. En revanche, les abus de ce dispositif doivent être combattus.

Je partage donc tout à fait, monsieur Durain, votre volonté de lutter contre le dumping social, non seulement, à l’échelon international, dans le cadre de la proposition de loi de Dominique Potier – il faut imposer le devoir de vigilance et la responsabilisation des donneurs d’ordres –, mais aussi sur la question du travail détaché, dont le cadre légal devrait évoluer dans les prochains mois.

Cela dit, tel n’est pas l’objectif de la commission d’experts ; plus largement, il ne faut pas assigner d’objectifs à cette commission, à qui il n’appartient pas de refaire le cadre du droit puisque cette refondation doit se faire à droit constant.

Voilà pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

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