Intervention de Daniel Lebègue

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 15 juin 2016 à 9h00
Lutte contre l'évasion et la fraude fiscales internationales — Audition de M. Daniel Lebègue président de transparency international france

Daniel Lebègue, président de Transparency International France :

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, merci de me donner l'occasion de m'exprimer devant vous.

Comme vous l'avez rappelé, Madame la présidente, je suis ces questions de finance offshore et de délinquance financière depuis trente ans. Les méandres de ma vie professionnelle et de ma vie associative m'ont fait aborder ces questions dans toutes les positions occupées : régulateur à la direction du Trésor, acteur à BNP Paribas puis à la Caisse des dépôts et consignations et, enfin, responsable d'une association dont l'objet même est de lutter contre l'opacité et les flux financiers illicites.

Malgré ces trente années d'expérience, j'ai beaucoup appris du dossier des « Panama Papers ». La finance offshore est un sujet dont on sait très peu pour et qui n'a quasiment pas été étudié par les économistes, à l'exception de James Henry aux États-Unis et de Gabriel Zucman en France.

Les statisticiens n'ont pratiquement pas ouvert le dossier : ni l'INSEE ni Eurostat n'ont, à ma connaissance, publié ou mené d'études qualitatives sur la finance offshore. Tel n'est pas le cas aux États-Unis, où la commission du budget du Congrès a fait des études très approfondies, régulièrement mises à jour.

Pour l'instant, ni la BCE ni la Banque des règlements internationaux n'ont véritablement analysé cette partie importante, croissante, de notre système financier et rendu publics des travaux sur le sujet.

Nous ne disposons donc que de très peu d'éléments. J'en profite pour donner un coup de chapeau au travail de votre Haute Assemblée, à travers le rapport d'Éric Bocquet, fait au nom de la commission d'enquête sur l'évasion des capitaux et des actifs hors de France et ses incidences fiscales, présidée par Philippe Dominati. Ce rapport de référence, fruit d'un travail de recherche et de nombreuses d'auditions est très intéressant, même s'il mériterait d'être enrichi et mis à jour.

Nous avons beaucoup à apprendre des « Panama Papers ». J'ai beaucoup appris sur les clients, les montages juridiques et financiers, les circuits et les intermédiaires... En l'espèce, si l'on trouve des financiers, les intermédiaires principaux sont des avocats : c'est en effet un cabinet d'avocats qui est au centre du dossier.

La masse d'informations réunie grâce à un lanceur d'alerte dont j'ignore l'identité, au travail formidable du consortium des journalistes d'investigation - une année de travail ! - et au relais assuré par des ONG investies sur ces questions depuis quelques années déjà - j'en citerai trois, mais il en est d'autres : Tax Justice Network, Oxfam et, bien évidemment Transparency International - nous a permis de progresser de manière formidable en termes de collecte et d'analyse de l'information.

Le problème est aujourd'hui d'exploiter cette mine, cette masse énorme d'informations. Éliane Houlette, que vous avez entendue, explique que le parquet national financier qu'elle dirige a besoin de super-ordinateurs pour exploiter l'ensemble des informations à sa disposition.

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