Je présenterai, dans un premier temps, la situation du marché du travail dans différents pays européens et du G7 - tout l'intérêt de l'OCDE est de pouvoir réaliser des comparaisons avec les autres grands pays développés - et, dans un second temps, les principales réformes relatives au marché du travail intervenues dans un certain nombre de pays européens et l'effet possible induit sur l'emploi - tout en sachant qu'il faut être assez prudent, ces réformes étant très récentes (M. Carcillo commente des slides projetées).
Dans un plusieurs pays européens, l'emploi n'a pas retrouvé son niveau d'avant la crise de 2008-2009. C'est notamment le cas de la France, dont le taux d'emploi est relativement faible par rapport aux autres pays européens et aux pays du G7, c'est-à-dire qu'une moindre proportion de la population en âge de travailler est en emploi.
La courbe d'employment gap, c'est-à-dire du manque d'emplois, montre bien que l'emploi a diminué dans beaucoup de pays, dont la France, par rapport à 2007. Les projections dont nous disposons jusqu'en 2017 nous laissent penser que cette situation perdurera encore quelque temps...
Il faut tout de même rappeler que 2007, année qui précède la crise, est un point de comparaison très exceptionnel : nous étions alors dans un point haut du cycle économique des pays du G7, 2006 et 2007 ayant été des années de forte croissance. Comparer la situation actuelle avec ce qu'elle était alors est donc un peu compliqué.
Si nous n'avons pas retrouvé le niveau d'emploi d'avant la crise, il en va de même du taux de chômage. Les projections dont nous disposons pour 2017 montrent que la situation de la France n'est pas très favorable : nous sommes encore loin des 7,5 % de 2007.
La France connaît un des taux de chômage les plus élevés des pays européens et des grands pays de l'OCDE. Dans certains pays du sud de l'Europe - Italie, Portugal, Espagne et Grèce -, qui ont beaucoup souffert de la crise, le taux de chômage a commencé à reculer, sans pour autant retrouver les niveaux de 2007.
La part du chômage de longue durée dans ce taux de chômage élevé est préoccupante. Depuis 2007, le chômage de longue durée a augmenté, notamment en France.
Si ces chiffres doivent être pris avec précaution, le chômage de longue durée est un phénomène inquiétant : plus il y a de chômeurs de longue durée, plus il est difficile de faire baisser le chômage rapidement. Toutes sortes de raisons peuvent expliquer cette situation : perte de qualification des personnes concernées, « effet de stigma »...
Toutefois, certains pays ayant des taux de chômage très faibles, je songe à l'Allemagne, par exemple, ont aussi une part élevée de chômeurs de longue durée. C'est qu'ils sont les derniers à faire sortir du chômage, ce qui est très difficile.
Le taux de chômage des jeunes est également inquiétant. Il est encore plus éloigné de ses niveaux d'avant la crise que le taux de chômage global.
Le taux de chômage des jeunes en France est de l'ordre de 24 %, soit juste en dessous des niveaux observés dans les pays du sud de l'Europe. Ce taux élevé est d'autant plus préoccupant qu'il emporte de nombreuses conséquences sociales - il peut même atteindre 50 % dans certaines zones.
S'il s'agit d'un indicateur intéressant, il faut noter que de nombreux jeunes ne sont pas sur le marché du travail. Les taux de chômage sont également difficilement comparables en raison des pratiques de chaque pays en matière de cumul emploi-études. Dans les pays du Nord, par exemple, les jeunes travaillent souvent, ce qui veut dire qu'ils sont également souvent au chômage pour de petites périodes, alors même qu'ils suivent des études. Cette situation est de nature à gonfler potentiellement les chiffres du chômage par rapport aux pays qui n'ont pas cette tradition.
L'OCDE a développé un autre indicateur, le taux de NEET - Neither Employed in Education or Training. Il s'agit des jeunes qui ne sont ni en emploi, ni en éducation, ni en formation. Pour dire les choses autrement, ce sont des jeunes au chômage, ou inactifs, qui ne se forment pas.
Cet indicateur permet d'aller plus loin que le taux de chômage en ce qu'il inclut aussi les inactifs, c'est-à-dire ceux qui ne vont même pas à Pôle emploi. Il est calculé à partir de l'ensemble de la population des jeunes de 15 à 29 ans, et non sur la seule base des jeunes actifs. La population NEET atteint en moyenne 12 % à 15 % dans les pays de l'OCDE ; elle est de 15 % en France, soit environ 1,7 million de jeunes Français qui ne sont ni dans l'emploi, ni scolarisés, ni en en formation...
Plus de la moitié de ces jeunes sont inactifs - ils ne sont même pas enregistrés à Pôle emploi - et environ un tiers d'entre eux n'a aucun diplôme.
Les pays connaissant les plus faibles taux de NEET disposent en général de très bons systèmes de formation. C'est le cas, par exemple, de l'Allemagne, de l'Autriche et de la Suisse, où l'apprentissage est très développé.
À l'inverse, les taux de NEET sont très élevés dans les pays du sud de l'Europe, en Espagne, en Grèce, en Italie et, malheureusement, en France.