Intervention de Stéphane Carcillo

Commission d'enquête Chiffres du chômage — Réunion du 9 juin 2016 à 14h00
Audition de M. Stéphane Carcillo économiste à la direction de l'emploi du travail et des affaires sociales de l'organisation de coopération de et développement économique ocde

Stéphane Carcillo :

Seule la Slovénie, dont je parlerai dans quelques instants, a pénalisé le CDD. Pénaliser le CDD a l'inconvénient d'alourdir le coût du travail de certaines entreprises.

Le Portugal a également mené des réformes très importantes : le licenciement pour motif économique a été facilité ; l'obligation de reclassement préalable à un licenciement a été supprimée ; la valeur des indemnités de licenciement a été fortement réduite...

Le Portugal a surtout mené l'une des plus importantes réformes en matière de négociation collective, rendant la main aux entreprises.

L'extension automatique administrative des accords de branche, sans se soucier de qui avait négocié ni du degré de représentativité des signataires, a été supprimée. Le Portugal exige maintenant un certain degré de représentativité des signataires, tant du côté patronal que du côté salarial. L'accord doit bien représenter les intérêts d'une majorité.

Le Portugal a également fixé de nouvelles règles s'agissant de la période de validité des conventions collectives. Les négociations doivent être plus régulières pour ne pas laisser en place trop longtemps des règles déjà obsolètes.

Enfin, le Portugal a permis aux entreprises de déroger, par accords d'entreprise, aux accords collectifs de branche, un peu comme le fameux article 2 du projet de loi « Travail. ».

En outre, les entreprises ont la possibilité de suspendre la portée des conventions collectives lorsqu'elles se trouvent en situation de crise économique et de négocier des accords de substitution.

La réforme conduite au Portugal est probablement celle qui est allée le plus loin en matière de négociation collective.

Les réformes menées en Grèce ont davantage porté sur la durée du préavis et le montant des indemnités de licenciement que sur la définition du licenciement économique.

La Grèce a ainsi supprimé toute indemnité et toute notion de préavis avant un an d'ancienneté dans l'entreprise. Elle a créé une sorte de « super période d'essai ». Elle a également augmenté le seuil de déclenchement des procédures de licenciement collectif.

À l'instar du Portugal, la Grèce a adopté d'importantes réformes en matière de négociation collective : elle a mis fin au monopole syndical pour la négociation des accords et a autorisé les représentants du personnel, au niveau de l'entreprise, à négocier des accords.

Elle a également mis fin, comme au Portugal, à l'extension automatique des accords par l'administration.

La Slovénie est l'un des rares pays à avoir touché en même temps au CDD et au CDI.

La réforme slovène de 2013 a réduit les périodes de préavis en fonction de l'ancienneté du CDI, modifié le système des indemnités de licenciement et mis fin à l'obligation de reclassement. Elle a surtout restreint le nombre de renouvellements de CDD et tenté d'aligner, sans y parvenir complètement, la prime de précarité versée à l'issue d'un CDD sur les indemnités dues à un salarié en CDI en cas de licenciement.

Le marché du travail slovène se caractérisait par un dualisme très marqué entre contrats permanents protégés et forte incidence de l'emploi temporaire. Après cette réforme, l'essentiel de la croissance en emplois s'est fait via le CDI.

Les réformes menées dans les pays les plus touchés par la crise ont permis de modifier le logiciel du marché du travail, et notamment la répartition entre CDD et CDI, au profit des derniers.

Ces réformes ont également porté sur la question de la négociation collective. Elles sont toutes allées dans le même sens : laisser les entreprises décider, à leur niveau, des règles les plus adaptées au lieu d'appliquer une toise commune.

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