Cet amendement vise à faire primer l’accord de branche sur l’accord d’entreprise en matière d’astreintes. Pour expliquer combien cette mesure est nécessaire, je prendrai l’exemple d’une entreprise de mon département des Côtes-d’Armor, la Cooperl, grosse entreprise agroalimentaire de Lamballe qui emploie 2 000 salariés et 500 intérimaires et est présente dans toute la filière porcine, depuis l’élevage jusqu’à la distribution, en passant par la recherche génétique.
À la fin de l’année 2015, la direction de cette entreprise a annoncé de façon unilatérale le gel des salaires pour 2016, la remise en cause du calcul de l’ancienneté et du treizième mois, ainsi qu’une réévaluation des temps de pause et des astreintes. C’est ce qu’elle a appelé une « réforme solidaire, juste et nécessaire » en raison de la crise agricole.
Le 25 février débutait une grève historique, d’une grande dignité, qui allait durer douze jours, avant que la direction n’accepte la négociation. Le dialogue a eu lieu. Au cours de cette grève, les dirigeants ont utilisé tous les moyens pour faire « plier » les salariés, allant jusqu’à appeler les agriculteurs pour bloquer le mouvement. Il faut également rappeler l’initiative du préfet et des élus de tous bords politiques qui œuvraient à la concertation afin de trouver une sortie au conflit.
Aujourd’hui, à la Cooperl, le temps d’intervention pendant les astreintes fait l’objet d’une prise en compte comme temps de travail effectif et d’une petite compensation financière.
L’inquiétude des salariés est grande sur cette nouvelle rédaction de l’article 2, qui fait primer l’accord d’entreprise sur l’accord de branche en matière d’astreintes.
Au sein de l’entreprise Cooperl, où les rapports sont fondés sur l’irrespect et le mépris, supprimer la référence à l’accord de branche comme base de la négociation revient à donner tous les droits à l’employeur. L’encadrement des astreintes serait subordonné à la force, en particulier dans un secteur où – l’actualité l’a montré – les patrons n’ont parfois que faire de la loi, qu’il s’agisse de la traçabilité et de la qualité des viandes, mais surtout de la protection des salariés.