Pour ceux qui doutent encore de la nocivité de l’article 2, lequel consacre l’inversion de la hiérarchie des normes, la lecture attentive des alinéas 96 à 131, tels que la majorité sénatoriale de droite les a modifiés en commission, est éclairante. En effet, la nouvelle version de la section du texte consacrée à la durée du travail débute tout bonnement par la suppression pure et simple de la notion de durée légale du travail !
Nos collègues du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC se sont engouffrés dans la porte ouverte en grand par l’article 2 en allant finalement au bout de la logique mise en œuvre par le Gouvernement dans ce projet de loi : définir un temps de travail à la carte, entreprise par entreprise. Exit la notion de durée légale de travail ! Exit la semaine de 35 heures ! Désormais, « la durée de référence du travail effectif des salariés à temps complet est fixée par un accord collectif ». En l’absence d’accord d’entreprise, la durée supplétive de référence est même fixée à 39 heures par semaine !
Les vœux de la droite sont ainsi exaucés, elle qui promet la fin des 35 heures depuis des années à longueur de meeting, d’autant plus que la suppression de la durée légale du travail permet, en parfaite harmonie avec la philosophie de ce projet de loi, de renier l’ensemble des garanties qui découlent actuellement de la durée légale du travail, dont le paiement des heures supplémentaires !
On voit bien combien la logique du texte poussée à l’extrême, et plus précisément celle de son article 2, revient à priver les salariés de garanties collectives en matière de temps de travail. Au nom d’une course au dumping social, ce texte conduira à un moins-disant social et salarial et ne contribuera en rien à la création d’emplois. Encore une fois, la preuve est faite des incohérences de ce projet de loi censé « favoriser l’emploi » !
En outre, il est en complète contradiction avec le développement d’une législation sur la santé au travail qui impose une obligation de résultat aux employeurs, comme l’obligation de préserver la santé physique et mentale des salariés ou celle de les protéger contre le harcèlement sexuel et moral. La droite l’a bien compris, puisqu’elle profite de l’article 21 pour réduire à la portion congrue le compte personnel de prévention de la pénibilité.