Intervention de Évelyne Didier

Réunion du 15 juin 2016 à 14h30
Nouvelles libertés et nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s — Article 2

Photo de Évelyne DidierÉvelyne Didier :

La définition du contingent annuel d’heures supplémentaires a déjà subi le sort de l’inversion de la hiérarchie des normes en 2008, et ce malgré l’opposition de députés aujourd’hui membres du Gouvernement…

En effet, c’est l’accord d’entreprise qui détermine le niveau où se situe ce contingent. Quel constat pouvons-nous dresser aujourd’hui ? Une dérégulation totale et un affaiblissement des droits des salariés !

Pour ne prendre que l’exemple de la grande distribution, on notera que l’inversion de la hiérarchie des normes a conduit à une grande diversité de situations. Bien que la loi fixe le contingent de référence à 220 heures, on peut observer que la convention collective de branche appliquée par le groupe Casino l’a fixé à 130 heures, celle de Monoprix à 90 heures, ou encore que le groupe Carrefour a opté pour une dérégulation totale, en appliquant un contingent d’heures supplémentaires variable, calculé chaque année en fonction du calendrier. De fait, cela a des effets in fine sur les conditions de travail et de vie des salariés.

Comme vous avez pu le constater, mes chers collègues, le groupe CRC a recueilli de nombreux témoignages de salariés sur ces conditions de travail.

Je vais pour ma part vous livrer le témoignage d’une salariée qui travaillait dans un supermarché Casino se situant dans un quartier vivant, à côté d’un Leader Price, d’un Monoprix et d’un Carrefour, tous dans la même rue.

Cela a débuté par l’ouverture du supermarché lors de certains jours fériés : auparavant, le supermarché où travaillait cette salariée était fermé, par exemple, le 1er novembre. Mais comme Leader Price ne l’était pas, la règle a changé !

Puis, notre témoin nous indique que les choses ont également changé au sujet des repos accordés à la suite d’heures supplémentaires pendant les fêtes : aucun congé n’était plus accordé aux salariés du magasin du 15 décembre au 15 janvier, y compris pour les étudiants qui devaient passer leurs partiels. Dans ces cas-là, tout le monde doit s’aligner sur le moins-disant !

Pour finir, ce sont les conditions de travail le dimanche qui ont évolué : tout comme Leader Price, le magasin Casino où travaillait la salariée était ouvert le dimanche de neuf heures à douze heures. Or Monoprix ouvrait, lui, de huit heures trente à treize heures. Les trois magasins avaient les mêmes salariés, c’est-à-dire exclusivement des étudiants, et la même clientèle : les directeurs des magasins n’avaient évidemment d’autre choix que de s’aligner sur les horaires les plus étendus. Notre témoin ajoute que le verrou ne pouvait que sauter et qu’il était facile pour un directeur de négocier quand les deux syndicalistes lui faisant face se savaient sur la sellette depuis six mois et avaient besoin de leur job !

Madame la ministre, vous savez bien que c’est comme cela que ça se passe ! La situation décrite ici montre clairement l’impossibilité d’aboutir à un accord équilibré au sein des entreprises, en tout cas dans la plupart d’entre elles, en raison du lien de subordination entre les salariés et leurs employeurs.

Par conséquent, il convient de donner force à la loi. C’est la seule façon de protéger les salariés des dérives du dumping social !

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