Dans la lignée de nos amendements visant à préserver le principe de faveur, celui-ci a pour objet de faire primer l’accord de branche sur l’accord d’entreprise dans le domaine de l’aménagement du temps de travail.
La modulation du temps de travail est déjà largement rendue possible, et s’avère très utile pour éviter le paiement d’heures supplémentaires. Les textes législatifs et conventionnels encadrent toutefois le dispositif pour le rendre plus difficile à mettre en œuvre, tant il est délétère pour le salarié.
Cette modulation illustre en fait très bien le lien de subordination qui existe entre un salarié et son employeur. Aujourd’hui, même sans accord, un employeur peut mettre en œuvre la modulation du temps de travail pour un maximum de quatre semaines. Demain, cette modulation pourra atteindre, sans accord, seize semaines, soit quatre fois plus.
Alors que l’on sait que beaucoup de salariés cumulent CDD et contrats courts, cela signifie tout bonnement que ces précaires ne bénéficieront très probablement jamais du paiement de leurs heures supplémentaires. Pis encore, ils ne seront jamais réellement maîtres de leurs horaires de travail.
Vous pourriez presque ajouter cyniquement que, de toute façon, les précaires ne touchent que rarement leurs heures supplémentaires, le non-paiement de celles-ci étant en effet le premier motif de redressement opéré par l’URSSAF, et l’une des principales causes de la perte de recettes pour la sécurité sociale, puisqu’elle représente près de dix fois le montant de ce que l’on appelle la fraude sociale.
L’ensemble de cette sous-section est très révélateur de l’esprit de cette réforme : la mise en retrait non seulement de la loi et de la convention collective, mais aussi du contrat de travail. Celui-ci pourra être, en quelque sorte, dénoncé légalement par l’employeur : en cas d’accord d’entreprise, les dispositions du contrat de travail qui concerneraient le temps de travail seraient tout simplement caduques.
Les accords d’entreprise seront également au-dessus des accords de branche. Si l’on reprend l’exemple de l’industrie de l’habillement, la durée maximale de la modulation était de six mois ; le recul, ici, est évident.
Ce texte permet en définitive de laisser tout pouvoir à l’employeur ou au donneur d’ordre. À ce niveau de modulation du temps de travail hebdomadaire, il ne s’agit plus simplement de flexibilité, mais d’hyperélasticité !