Intervention de Myriam El Khomri

Réunion du 16 juin 2016 à 10h30
Nouvelles libertés et nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s — Article 2, amendements 294 97

Myriam El Khomri, ministre :

Quant aux heures complémentaires, là encore nous sommes à droit constant : leur taux est de 10 % dès la première heure, depuis l’ANI de 2013 – c’est l’un des grands acquis au-delà de la durée minimale de travail du salarié à temps partiel fixée à 24 heures hebdomadaires. Au-delà du dixième des heures prévues au contrat, ce taux est de 25 %. Seul un accord de branche étendu pourra abaisser ce taux, dans la limite de 10 %. Je le répète pour que les choses soient très claires : c’est le droit actuel !

Je voudrais enfin dire quelques mots du travail de nuit, sujet très important touchant à la santé des travailleurs et qui a donné lieu à de nombreux amendements.

La réforme de la médecine du travail n’entraînera en aucun cas une réduction de l’effectivité et de la qualité du suivi de l’état de santé des 3, 5 millions de travailleurs de nuit. Bien au contraire, elle permettra une action plus efficace et mieux ciblée de la médecine du travail au service de la prévention. Moi aussi, je suis attachée au droit, mais je préfère que le droit soit réel et non fictif. Sur 20 millions de recrutements effectués chaque année, 3 millions de visites médicales d’embauche sont réalisées.

Les travailleurs de nuit continueront à bénéficier d’une surveillance médicale renforcée et, si la nature du poste auquel ils sont affectés l’exige, d’une visite d’embauche, dont les modalités seront précisées par décret en Conseil d’État.

Si j’ai choisi de mettre fin à la surveillance semestrielle fixée par les textes actuels, c’est pour deux raisons principales.

D’une part, elle n’est pas efficiente. Un large consensus scientifique s’est en effet dégagé pour considérer cette périodicité comme peu pertinente pour protéger la santé des salariés. Elle n’est par exemple pas préconisée par la Société française de médecine du travail. On me reproche suffisamment de demander trop de rapports dans le cadre de mon ministère pour que je puisse vous assurer, mesdames, messieurs les sénateurs, que ce je propose est aussi l’application d’études que nous faisons mener par des professionnels.

D’autre part, la surveillance semestrielle est peu effective du fait de la pénurie de la ressource médicale.

Ce n’est pas faute, je le redis, d’ouvrir des postes de médecin du travail. La santé des salariés est un sujet de première importance pour le Gouvernement et nous aurons bien évidemment un débat sur la médecine du travail.

S’agissant du burn-out, je viens tout juste de signer un décret qui facilite la reconnaissance des pathologies psychiques liées à l’épuisement professionnel par les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles.

Je dirai également quelques mots des forfaits jours.

Avec ce projet de loi, nous protégerons mieux les salariés. Nous inscrivons dans le code du travail des garanties pour assurer le caractère raisonnable de la charge de travail. Vous le savez, plusieurs conventions collectives ont été retoquées par la Cour de cassation. Nous mettons en place un système pour que les employeurs ne puissent pas s’abriter derrière un accord de branche lacunaire pour ne pas protéger les salariés au forfait jours contre une charge de travail déraisonnable. Je ne peux donc pas laisser dire que ce projet de loi enlèverait des droits aux salariés. C’est précisément l’inverse !

De la même manière, je ne souhaite pas revenir sur les points que nous avons fait évoluer par la négociation avec les organisations syndicales et les organisations de jeunesse qui ont fait des propositions. Réformer dans le dialogue est notre ligne de conduite. Quand des organisations ont fait le choix du dialogue et présenté des propositions, comme certaines l’ont fait au mois de mars dernier, je les ai écoutées. Je suis tenue par le compromis que nous avons ainsi élaboré avec elles et je suis donc favorable aux amendements déposés par le groupe socialiste et républicain et par le groupe CRC qui tendent à revenir au texte issu des travaux de l’Assemblée nationale sur ces sujets.

Je ne désire pas non plus remettre en cause le travail des députés qui a permis d’apporter des garanties supplémentaires aux salariés. Je pense par exemple à la disposition qui permettra à ceux-ci de prendre leurs congés dès leur embauche. C’est une avancée que je souhaite conserver dans le texte.

Bien évidemment, le Gouvernement est aussi à l’écoute des propositions du Sénat.

Je partage l’idée que, lorsqu’il est majoré du fait d’un handicap, le temps domicile-travail doit faire l’objet d’une contrepartie financière ou en termes de repos. Je suis donc favorable à l’amendement n° 294 de Mme Gillot, ainsi qu’à l’amendement n° 97 rectifié ter de M. Mouiller, sous réserve que soit enlevée la référence à la pénibilité, car elle rend la mesure plus difficilement applicable.

Je suis favorable à l’amendement n° 368, qui vise à préciser que les vingt minutes de pause toutes les six heures sont consécutives.

Je suis favorable aux amendements identiques n° 296 et 523, respectivement présentéspar Mme Gillot et par M. Watrin. Il me semble en effet important de préciser que le fait de s’occuper d’une personne handicapée ou malade chronique fait partie des obligations familiales impérieuses autorisant le travailleur de nuit à demander un poste de jour.

Je suis favorable à l’amendement n° 299 de Mme Gillot qui tend à donner la possibilité à l’accord collectif de majorer la durée des congés des personnes en situation de pénibilité au travail.

Je suis favorable aux amendements n° 294, 345, 435 rectifié, 956, 482, 368, 884 rectifié, 916 rectifié, 855, 517, 518, 522, 296, 523 – vous m’interrogiez, monsieur le rapporteur –, 888 rectifié, 347, 990, 299, 1007, 1008, 1009, 1011 et 1025.

Il en était de même pour les amendements n° 885 rectifié, 886 rectifié, 887 rectifié et 889 rectifié, qui n’ont pas été soutenus.

Je suis également favorable à l’amendement n° 511.

Je suis très tentée de me prononcer favorablement sur l’amendement n° 557, mais mes services me signalent qu’il pose un problème juridique. Je demanderai donc quelques instants pour vérifier ce point.

Je m’en remets à la sagesse du Sénat sur les amendements n° 412 rectifié et 413 rectifié, ainsi que sur l’amendement n° 92 rectifié bis.

Je suis défavorable aux autres amendements.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je crois que l’article 2, dans la version issue des travaux de l’Assemblée nationale, est véritablement un article de progrès et reflète toute la philosophie du projet de loi.

Vous l’avez constaté, le Gouvernement est tout à fait ouvert à la possibilité d’y apporter des améliorations sans en dénaturer la philosophie.

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