Intervention de Brigitte Gonthier-Maurin

Réunion du 21 juin 2016 à 9h30
Questions orales — Traite et migrantes

Photo de Brigitte Gonthier-MaurinBrigitte Gonthier-Maurin :

Madame la secrétaire d'État, le récent rapport de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes du Sénat sur la traite des êtres humains, dont j’ai été corapporteur, a souligné le risque d’amplification du phénomène de traite dans le contexte actuel de crise des migrants.

Selon les statistiques de l’ONU, 70 % des victimes de la traite des êtres humains sont des femmes et de jeunes filles.

Depuis le conflit en Syrie, la proportion de femmes, parmi les migrants, a nettement augmenté. Notre attention a donc été attirée sur les dangers encourus spécifiquement par les femmes dans ces situations tragiques de grande vulnérabilité.

Nous savons que la frontière entre traite et trafic illicite de migrants est extrêmement poreuse.

Dans son rapport du mois de janvier dernier, la Commission nationale consultative des droits de l’homme, la CNCDH, rappelle que « le désir de migrer étant un ressort extrêmement puissant de la traite des êtres humains, l’immigration illégale n’est parfois que “la face cachée de la traite” ».

Human Rights Watch a fait état de cas dans lesquels des migrants avaient versé de l’argent à des passeurs clandestins, puis avaient été remis entre les mains d’individus se livrant à la traite.

La crise actuelle réunit les conditions pour que les réseaux exploitent cette situation. La traite est, d’ailleurs, une réalité tangible au sein des camps de migrants.

À Calais, l’association France Terre d’Asile a mis en place une structure spécifique, fondée sur un projet d’identification, d’information et d’orientation des victimes de la traite des êtres humains dans le Calaisis.

L’identification des victimes est d’une extrême difficulté. Or c’est l’étape indispensable à leur protection.

En situation de vulnérabilité extrême, ces victimes sont toutes sous emprise. Nos interlocuteurs ont rappelé que les exploiteurs mettaient tout en œuvre pour les empêcher de verbaliser leur parcours de vie véritable et leur qualité de victime de la traite.

Dès lors, comment mieux détecter les victimes potentielles de la traite ? Les témoignages entendus par la délégation convergent pour souligner la nécessité de médiateurs culturels. Je vous demande donc, madame la secrétaire d'État, de créer les 50 postes de médiateur culturel annoncés dans le cadre du plan d’action national contre la traite des êtres humains 2014-2016.

Le Gouvernement peut agir sur un second plan : il peut compléter le questionnaire annexé à l’arrêté du 23 octobre 2015, afin de prévoir des questions relatives à toutes les situations de vulnérabilité visées à l’article L. 744-6 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le CESEDA.

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