Madame la ministre, je souhaite profiter de cet article sur le dialogue social dans le domaine de la production cinématographique, de l’audiovisuel et du spectacle pour vous alerter sur les intermittents du spectacle.
Comme vous l’annonciez la semaine dernière, le Gouvernement s’apprête à compenser le manque à gagner pour l’assurance chômage à la suite de l’accord signé au mois d’avril entre les intermittents du spectacle et les organisations patronales. Nous sommes d’accord sur une chose : il faut que cet accord soit appliqué. Il prend en compte bon nombre des revendications des intermittents : date anniversaire, 507 heures sur douze mois, prise en compte des congés maternité et des heures d’enseignement artistique, droits de celles et ceux qui arrivent à la retraite.
Là où nous avons un désaccord profond, c’est qu’il semble que vous ayez au final cédé à la pression patronale. Le régime de sécurité sociale s’appuie sur un principe simple : la solidarité entre employeurs et employés, et entre générations.
Pression, disais-je, car regardons les choses en face : qui a imposé une lettre de cadrage scandaleuse faisant porter sur les épaules des intermittents toute la responsabilité du déficit de l’UNEDIC ? Qui a mis dans la balance les négociations avec le projet de loi que nous examinons ?
Aujourd’hui, alors même que la précarité n’a jamais autant touché les intermittents et que les employeurs n’ont jamais autant bénéficié de baisses de cotisations, votre décision de combler les manques patronaux crée un précédent gravissime.
Comme le signale un collectif de personnalités du spectacle, regroupant notamment Mathieu Amalric, Agnès Jaoui ou Denis Podalydès, la prise en charge de l’assurance chômage par l’État risque de tuer l’intermittence, en la rendant dépendante de budgets fluctuant au gré des majorités politiques.
De fait, les intermittents sont un fabuleux exemple du modèle de flexisécurité que vous entendez imposer aux autres salariés.