Je remercie le président Hervé Maurey d'avoir accepté ma proposition de venir vous présenter les nouvelles orientations stratégiques du groupe RATP et évoquer avec vous nos principaux sujets d'actualité, un peu plus d'un an après ma nomination.
La RATP dispose d'une solide culture d'entreprise. Dès mon arrivée, j'ai eu beaucoup de plaisir à découvrir des femmes et des hommes attachés à leur entreprise et fiers de participer à une belle et grande mission de service public. Les salariés sont dotés d'un très grand professionnalisme, reconnu en France mais également dans l'ensemble des pays où je me suis rendue ces derniers mois. Le savoir-faire de la RATP s'exporte bien et participe au rayonnement de la France.
J'éprouve donc une très grande fierté à diriger cette entreprise attachante et qui se porte bien. Elle réussit à assurer sa mission de service public au service des Franciliens, dans le cadre du contrat avec son autorité organisatrice, le Syndicat des Transports d'Île-de-France, tout en consolidant son modèle économique avec des résultats robustes, qui lui permettent d'assurer la pérennité et le renouvellement de ses infrastructures et de son matériel roulant.
Mais la RATP doit se préparer à de grands défis, en particulier la mise en concurrence de son réseau de bus à partir du 1er janvier 2025. Cette échéance peut paraître lointaine, mais les enjeux sont tels, sur le plan social comme économique, qu'elle doit s'y préparer dès aujourd'hui. En outre, depuis 2009, les lignes nouvellement créées sont mises en concurrence. Ce sera le cas, très prochainement, des tramways T9 et T10 et des lignes du Grand Paris Express. La RATP doit être prête pour ces grandes échéances. C'est tout le sens des orientations stratégiques que je vais vous présenter.
Ces orientations s'appuient sur quelques éléments de constat. Face à l'ouverture à la concurrence mais aussi face à l'évolution des attentes de nos clients, y compris dans leurs usages numériques, et face au développement de nouvelles formes de mobilité, il est indispensable de mettre encore davantage le voyageur au centre de nos préoccupations.
La RATP doit également renforcer sa culture d'amélioration continue, en recherchant des modèles d'excellence, pour challenger sans cesse ses méthodes, au bénéfice de la qualité et de la performance du service offert, de façon à pouvoir affronter la concurrence avec succès.
Face à ces enjeux, l'innovation est un levier fondamental, pour les systèmes de transport, mais aussi pour les services, digitaux en particulier.
Enfin, la RATP a un rôle à jouer dans le rayonnement de la France à travers le monde, non seulement en répondant à une demande toujours plus forte en transports publics dans l'ensemble des métropoles mondiales mais également en contribuant à l'organisation de grands évènements internationaux à Paris, comme nous l'avons fait en décembre dernier pour la COP 21 et comme nous sommes en train de le faire pour l'Euro 2016 et demain, en soutenant la candidature de la France pour les Jeux Olympiques de 2024 et l'Exposition universelle de 2025.
Pour répondre à l'ensemble de ces enjeux, j'ai défini trois priorités pour l'avenir du groupe RATP.
En premier lieu, la RATP doit viser l'excellence au service des voyageurs, en s'appuyant sur les compétences des femmes et des hommes du groupe. En deuxième priorité, il est indispensable de promouvoir l'innovation dans tous les domaines. Enfin, il est primordial que le groupe RATP s'affirme comme un acteur essentiel de la ville durable.
Ces trois priorités doivent être constamment enrichies par une démarche volontariste d'écoute. C'est la méthode que j'ai décidé d'appliquer. Écoute de nos voyageurs, dans un objectif d'amélioration continue de notre qualité de service ; nous devrions, par exemple, lancer très prochainement une consultation auprès de nos voyageurs sur les commerces et services qu'ils souhaitent trouver dans nos espaces. Écoute de nos autorités organisatrices et des élus locaux, pour être capable de répondre à leurs aspirations et de nous différencier de la concurrence. Écoute, enfin et surtout, de nos salariés, sans qui la RATP ne pourra relever les grands défis qui l'attendent.
D'un point de vue opérationnel, les trois priorités se déclinent en dix chantiers.
Quatre chantiers concernent notre politique d'excellence. Le premier, « s'affirmer comme un groupe aux meilleurs standards mondiaux », vise à capitaliser sur la diversité des expériences et des savoir-faire pour que notre développement à l'international, qui s'appuie sur l'expertise de l'EPIC, soit source d'inspiration et d'innovation pour nos voyageurs franciliens.
Le deuxième chantier est de « conforter la culture de sécurité et de sûreté du groupe ». La sécurité ferroviaire est l'un de nos grands domaines d'excellence et il est indispensable de maintenir notre vigilance. Concernant la sûreté des personnes, j'y reviendrai dans les sujets d'actualité.
Le troisième chantier est de « développer la performance de l'ingénierie au service des clients internes et externes ». Avec un programme d'investissements en Île-de-France de 8,5 milliards d'euros sur les cinq prochaines années, avec le Stif, il est indispensable que nous soyons en mesure de délivrer les projets dans les délais et les coûts impartis.
Le quatrième chantier est « la mobilisation générale de l'entreprise sur le RER ». Nous devons augmenter le niveau de satisfaction sur les lignes A et B du RER. Avec le soutien du Stif, nous allons investir plus d'1 milliard d'euros d'ici 2020 pour y parvenir.
Quatre autres chantiers traitent de l'innovation. Le premier, « développer notre capacité à innover plus et plus vite », consiste à mener une politique offensive de recherche et d'innovation pour rester à la pointe de notre secteur. J'ai décidé la création d'une direction de la stratégie, de l'innovation et du développement qui est en charge de ce sujet pour l'ensemble du groupe.
Le deuxième chantier est de « continuer à être à la pointe de l'innovation sociale, en maintenant l'humain au coeur du développement du groupe ». Je suis profondément convaincue que les femmes et les hommes de la RATP sont la première richesse du groupe et que nous devons tout faire pour préserver la culture et les valeurs de cette entreprise. C'est la feuille de route que j'ai fixée au nouveau directeur des ressources humaines qui nous a rejoints il y a quelques semaines.
Le troisième chantier est de « faire du mode métro un levier de développement du groupe, en France et à l'international ». Le réseau parisien est la vitrine de la RATP et de notre industrie ferroviaire et nous devons être à la hauteur des grands rendez-vous qui nous attendent, les prolongements des lignes 4, 11, 12 et 14, l'automatisation de la ligne 4, le réseau du Grand Paris Express, pour être en mesure de répondre à des appels d'offres internationaux.
Enfin, le dernier chantier dans le domaine de l'innovation est d' « offrir de nouveaux services personnalisés et digitaux à nos voyageurs ». La RATP doit être en mesure de proposer une offre de mobilité connectée globale et durable pour répondre aux attentes de ses voyageurs.
Les deux derniers chantiers sont dédiés à la ville durable. Pour « renforcer la contribution économique, sociale et environnementale de la RATP aux enjeux de la ville durable », nous disposons d'un savoir-faire unique d'opérateur de réseau intégré à l'échelle d'une métropole, y compris en termes de valorisation immobilière de nos parcelles industrielles ou encore dans le domaine de l'éco-conception.
Enfin, chantier emblématique pour préparer l'avenir du groupe, nous devons « moderniser le réseau de surface pour nous préparer à la concurrence ». Il s'agit de réussir la transition énergétique de notre parc de bus avec le grand plan « bus 2025 » qui prévoit le remplacement de nos 4 500 bus par des véhicules électriques et au biogaz, mais également de préparer l'ouverture à la concurrence de notre réseau fin 2024 tout en renforçant les positions de la RATP au-delà de son périmètre historique.
Tous ces chantiers, alimentés par une large démarche participative à laquelle chaque salarié est appelé à contribuer, traduisent la volonté du groupe RATP de mener une politique active d'innovation et d'amélioration continues, centrée sur l'écoute des besoins de nos clients, afin d'incarner la mobilité durable et la ville intelligente.
Je souhaiterais maintenant aborder avec vous différents sujets d'actualité. En premier lieu, je voudrais revenir sur le modèle économique de la RATP, sur lequel s'appuient les orientations stratégiques que je viens d'évoquer, et sur les résultats 2015 du groupe, que nous avons présentés en mars dernier.
Le groupe RATP dispose d'un modèle économique spécifique et vertueux. Contrairement aux délégations de service public classiques, la RATP est aussi propriétaire et gestionnaire de l'infrastructure et participe largement au renouvellement des matériels roulants en Île-de-France. Cela lui impose de dégager un résultat significatif pour financer ses investissements en disposant d'une capacité d'autofinancement suffisante, les seuls amortissements ne permettant pas d'assurer la pérennité de ses actifs, dont la valeur dépasse aujourd'hui 9 milliards d'euros et atteindra 10 milliards d'euros à la fin du contrat 2016-2020. Grâce au système de contractualisation avec son autorité organisatrice, et contrairement, par exemple, à SNCF Réseau, la RATP n'est pas tributaire de subventions annuelles d'investissement et dispose d'une visibilité pluriannuelle qui lui a permis, et doit continuer à lui permettre, d'assurer la pérennité d'un réseau de plus en plus sollicité.
Nous avons donc prévu avec le Stif, pour le contrat 2016-2020, un programme d'investissements de 8,5 milliards d'euros sur cinq ans, dont 4,2 milliards sur fonds propres de la RATP.
La hausse du résultat net de la RATP ces dernières années était donc programmée dans le cadre du contrat avec le Stif pour soutenir cette politique d'investissements, sans accroître la dette. Cette progression des résultats traduit également les efforts des salariés et l'amélioration de la performance économique de l'entreprise qui assure, avec sensiblement les mêmes effectifs, une offre de transport accrue de 20 % en 10 ans.
Les résultats 2015 sont donc de bons résultats qui confortent l'équilibre et la dynamique du groupe RATP, avec un chiffre d'affaires de près de 5,6 milliards d'euros, en progression de 5,7 % par rapport à 2014, porté notamment par la contribution des filiales qui atteint désormais plus de 20 % du chiffre d'affaires. Hors éléments exceptionnels et conjoncturels, le résultat net 2015, de 302 millions d'euros, est stable par rapport à 2014, en raison du faible niveau d'inflation et partant, de la faible augmentation de la rémunération de la RATP par le Stif, de la faible progression du trafic, notamment à cause des attentats, et des dépenses engagées pour améliorer la qualité du service offert.
Le nouveau contrat avec le Stif, qui est bâti sur le même modèle que le précédent, devrait conduire à un niveau de résultat net de l'ordre de 200 millions d'euros pour 2016, du fait notamment d'un débasage de 100 millions d'euros par an de la rémunération versée à la RATP. La RATP assurera en outre, dans cette enveloppe, des services nouveaux et des offres supplémentaires, à hauteur d'environ 45 millions d'euros par an. Ce contrat plus exigeant se traduit donc par un effort de la RATP de 145 millions d'euros par an en moyenne sur la période.
Notre trajectoire pour 2020 est conforme à celle fixée dans notre plan d'entreprise, en accord avec l'État, qui vise un chiffre d'affaires de 7 milliards d'euros dont 30 % générés par les filiales et un ratio dette sur capitaux propres autour de 1, contre 3 en 2006, ce qui est indispensable pour continuer à pouvoir emprunter sur les marchés.
L'ensemble de ces bons résultats n'est jamais réalisé au détriment de la qualité de service. Toutes les équipes de la RATP sont fortement engagées pour faire progresser de manière notable la régularité de nos lignes. La qualité de service est notre priorité.
Le deuxième sujet que je souhaite aborder est le contexte sécuritaire, et l'engagement de la RATP dans ce domaine, en particulier au moment où la France accueille l'Euro de football 2016. Nos 45 000 salariés franciliens sont entièrement mobilisés, aux côtés des pouvoirs publics, pour contribuer à faire de cet évènement une grande réussite en garantissant une qualité d'accueil de nos visiteurs optimale malgré une menace terroriste permanente.
Dans ce contexte, nous avons sensiblement augmenté le nombre de patrouilles du groupe de sécurité et de protection des réseaux (GPSR) et nos agents sur le terrain font preuve de la plus grande vigilance. Les 1000 agents du GPSR et les 5 500 agents de station, appuyés par un système de vidéo-protection de plus de 37 000 caméras, font partie intégrante du dispositif sécuritaire francilien. La loi du 22 mars 2016 sur la sécurité dans les transports collectifs contient de nombreuses dispositions que nous souhaitions, comme la possibilité de demander des enquêtes administratives pour les personnes occupant des emplois sensibles chez les opérateurs de transport, et je remercie l'ensemble des parlementaires qui ont oeuvré à l'adoption de ce texte.
Troisième sujet d'actualité, notre plan Bus 2025 qui prévoit le remplacement de nos 4 500 bus franciliens par une flotte 100 % électrique. Ce plan avance bien et nous sommes désormais dans une phase d'expérimentation avec différents constructeurs pour analyser les conséquences de l'arrivée de matériels électriques sur nos lignes, aussi bien sur le service de transport, le ressenti de nos voyageurs et de nos machinistes, mais aussi la maintenance, l'adaptation de notre outil industriel et le raccordement au réseau électrique. La consommation de ce parc électrique correspond à la consommation de cinq lignes de métro ou d'une ville de 80 000 habitants. Cela nous impose de réfléchir à la façon dont nous nous insérons dans le réseau électrique francilien.
Il y a quelques semaines, nous avons accueilli le premier bus du groupe Bolloré sur la ligne 341 de notre réseau parisien. D'ici la fin de l'année, cette ligne sera entièrement équipée de bus électriques, ce qui constituera une première en Europe. Dans le même temps, nous testons d'autres véhicules de différents constructeurs : le français Heuliez bus, le polonais Solaris, l'espagnol Irizar, ainsi qu'un constructeur chinois, Yutong, associé au français Dietrich Carebus. De plus, la semaine dernière, nous avons signé des accords avec le suédois Volvo et le chinois BYD pour tester leur modèle prochainement. Enfin, Alstom est en train de préparer un modèle que nous devrions aussi essayer.
Nous testons donc différents constructeurs et technologies, avant de lancer les premiers appels d'offres, à la fin de l'année prochaine. Nous avons deux priorités pour ce plan.
La première concerne le coût. Si les premiers modèles de bus électriques sont plus chers que les modèles diesel ou hybrides, nous comptons sur un effet d'entraînement de l'ensemble de la filière industrielle, en particulier en France, pour faire baisser les coûts. Notre objectif est que le coût complet d'un bus électrique ne soit pas plus élevé que celui d'un bus thermique.
La deuxième priorité est de favoriser la création d'emplois sur le territoire national, comme nous le faisons déjà avec, en 2015, plus de 2,6 milliards d'euros de commandes auprès de 4 900 entreprises françaises différentes, dont 67 % de PME. Au total, chaque année, la RATP contribue au maintien ou à la création de 26 000 emplois sur le territoire national et nous comptons amplifier ce mouvement à travers nos commandes de bus électriques.
Enfin, la semaine dernière, nous avons conclu un accord avec deux entreprises françaises, Navya et EasyMile, pour acheter deux minibus autonomes. L'objectif est de nous familiariser avec cette nouvelle technologie, pouvoir proposer de nouveaux services de mobilité, en particulier dans les zones peu denses, où ce type d'offre peut être adapté, en complément de l'offre traditionnelle.
À travers notre plan bus 2025 ou l'achat de véhicules autonomes, la RATP met en oeuvre la même vision de la ville durable : une ville qui encourage l'utilisation des transports publics, toujours plus adaptés aux territoires qu'ils desservent, conjuguant innovation technologique et excellence environnementale.
Un dernier mot enfin concernant l'actualité de nos filiales : à travers notre filiale RATP Dev, le groupe RATP se développe en France comme à l'étranger, avec un chiffre d'affaires supérieur à 1,1 milliard pour l'année 2015, en hausse de 25 % par rapport à 2014. Ces bons résultats proviennent d'un développement maîtrisé, alliant croissance en volume et rentabilité.
En France, RATP Dev s'est particulièrement renforcé dans la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie, notamment à travers l'exploitation du réseau multimodal de l'agglomération de Valenciennes.
À l'international, les équipes de RATP Dev remportent de nombreux succès, que ce soit à Riyad, à Manille, en Algérie ou encore au Texas.
2016 s'annonce comme une belle année avec la récente mise en service par RATP Dev du tramway de Washington, et l'adjudication prononcée en notre faveur dans le cadre de l'appel d'offres pour l'exploitation de l'ensemble des bus urbains et interurbains de la Toscane, dernière étape avant la signature du contrat. Ce contrat, d'une durée de 11 ans, représente près de 3 000 bus, plus de 5 400 employés et plus de 100 millions de kilomètres parcourus par an.
Enfin, Systra, notre filiale d'ingénierie commune avec la SNCF, fleuron national présent dans plus de 80 pays, a également réalisé une très bonne année 2015 avec un chiffre d'affaires de 623 millions d'euros, en hausse de 18 % par rapport à 2014. Très engagé en France dans la mise en oeuvre du Grand Paris Express, Systra confirme son ancrage à l'international, notamment au Moyen-Orient et en Asie, en réalisant plus de 55 % de son chiffre d'affaires hors de France.
Ce développement à l'international de nos filiales, dont je me réjouis qu'il soit soutenu par 85 % des salariés de la RATP, d'après le dernier baromètre interne, ne se fera jamais au détriment de notre mobilisation au service de l'Île-de-France, qui reste notre priorité.
Vous l'aurez compris, la RATP ne manque ni de défis ni de projets. Vous pouvez avoir confiance en ses salariés pour affronter l'avenir avec détermination et professionnalisme, dans le respect des valeurs d'une grande entreprise de service public.
Vous êtes les bienvenus pour venir visiter nos installations et observer, sur le terrain, l'engagement et la capacité d'innovation de la RATP.