Ce débat est très important. Doit-on instaurer un cadre prédéfini qui rende le travail du juge très simple ou bien le juge doit-il pouvoir vérifier lui-même si les difficultés économiques sont ou non structurelles ?
En prenant connaissance des dossiers, un juge peut parfois découvrir que ces difficultés structurelles sont organisées par l’entreprise elle-même. Comme je l’ai dit lors de l’examen de l’article 2, j’ai observé une société externaliser complètement sa production en Chine, puis expliquer à ses salariés en France qu’il était nécessaire de recourir au chômage partiel, avant de licencier.
Il est essentiel que, sur une telle question, on puisse d’abord faire la différence entre les PME et les grands groupes. En effet, on voit aujourd’hui de grands groupes se saisir d’articles du code du travail et en transformer complètement le sens pour arriver à leurs fins ; je pense ainsi aux externalisations qui seront permises par l’article 41 de ce texte. Il ne faut donc pas faire d’angélisme.
Notre collègue Longuet nous invitait à prendre garde si nous voulions que les investisseurs étrangers viennent en France. Selon lui, il faudrait juger non pas le groupe tout entier mais uniquement l’entreprise. Je pense pour ma part que, quand on investit en France, c’est pour profiter de l’une des meilleures productivités du monde et des savoir-faire exceptionnels présents dans notre pays. On ne choisit pas un pays parce qu’on pourrait y licencier comme on veut : autrement, il n’y a que l’embarras du choix !
Nous devons avoir un vrai débat intellectuel et politique sur ces questions, faute de quoi, si vous me permettez l’expression, tout fout le camp ! On aura des débats à n’en plus finir et on n’arrivera à rien.
Quoi qu’il en soit, l’appréciation par le juge de l’existence de difficultés structurelles demeure à mes yeux un élément fondamental.