J’entends tout à fait les critiques que suscitent les abus observés, d’autant que l’usage de ce mode de rupture des contrats de travail est parfois beaucoup trop généralisé.
Je le rappelle, le régime de la rupture conventionnelle a été créé en 2008 dans le cadre d’un accord national interprofessionnel. Il permet de répondre à un besoin manifeste : concilier les droits du salarié et la sécurisation des procédures pour l’entreprise.
Ce dispositif est très largement utilisé : en 2015, on a dénombré 360 000 ruptures conventionnelles en France. Les PME y ont tout particulièrement recours. Nous débattrons certainement de cette question en examinant l’article 30, notamment pour ce qui concerne le critère de « difficultés économiques ».
Aujourd’hui, les ruptures conventionnelles représentent 20 % des fins de CDI dans les petites entreprises, contre 14 % dans les PME et seulement 7 % dans les plus grosses entreprises. On le voit bien, même si elles subissent des difficultés, les plus petites entreprises rechignent à recourir au licenciement pour motif économique ; elles optent de préférence pour la rupture conventionnelle. Les trois quarts des ruptures conventionnelles concernent des entreprises de moins de cinquante salariés. Telle est la réalité actuelle.
Cela étant, le régime de la rupture conventionnelle reste encadré. Tout d’abord, il nécessite l’accord exprès des deux parties et un entretien obligatoire. Ensuite, il est assorti d’un délai de rétractation. Enfin, il impose la déclaration et l’homologation par l’administration, qui garantit à la fois la loyauté de la rupture et le libre consentement du salarié.
Dans le cadre de l’accord national interprofessionnel de 2008, les partenaires sociaux ont tenu à confier cette mission de contrôle à l’administration. Sachez que sa mise en œuvre est effective : toutes les ruptures conventionnelles ne sont pas homologuées. Le taux de refus est d’environ 5 %.
Mesdames, messieurs les sénateurs, notre pays manifeste clairement une réticence à embaucher en CDI. Ce n’est pas un hasard si la France est, au sein de l’Union européenne, le deuxième État recourant aux CDD de moins d’un mois.