Le portage salarial, dont le principe a été posé, notamment, par l’ordonnance du 2 avril 2015, introduit une nouvelle forme de relation au travail, et donc au droit du travail, en lieu et place du lien de subordination clair entre un employeur et un employé, ou en lieu et place de la relation entre fournisseur et client pouvant exister dans le cadre de la prestation de services.
Le Gouvernement propose en quelque sorte d’instaurer une troisième voie. Dans cette nouvelle relation, il y a trois acteurs : une entreprise cliente, qui a besoin ponctuellement d’un salarié qualifié ; ledit salarié, auto-entrepreneur ou presque, qui va devoir négocier le prix de sa prestation et ses conditions de travail ; enfin, une société tierce, dite de portage, qui encaissera le prix de la prestation avant de la reverser, moins une commission, au salarié « porté ». C’est cette dernière entreprise qui établira les fiches de paie, les documents administratifs, et qui versera les cotisations aux différentes caisses.
Ce nouveau statut revient donc à mettre le salarié dans une situation où il est lui-même travailleur, commercial de sa propre force de travail et, de fait, « client » de la société de portage, qui lui assure son statut de salarié via la prise en charge de la partie administrative.
Si cette disposition se pare des atours de la liberté, elle n’offre aucune protection, aucune garantie quant au maintien de l’emploi, aucun avantage lié à l’ancienneté, etc. C’est d’ailleurs pour ce motif que la Cour de cassation s’est prononcée à plusieurs reprises pour contraindre les entreprises de portage à verser des salaires aux salariés, même sans travail, se fondant sur le fait que l’absence de mission ne justifie pas le non-versement d’un salaire au salarié, fût-il porté.
L’article 38 vise justement à sécuriser le cadre des entreprises de portage et, à notre sens, à prévenir de nouvelles défaites de ces derniers devant la Cour de cassation. Ce n’est nullement souhaitable, et c’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.