De fait, l’année 2015 a vu un gonflement inédit du recours au travail détaché, qui s’est accru de 27 %.
Certes, la législation a évolué, avec, notamment, l’entrée en vigueur de la loi Savary. L’obligation de production de la déclaration de détachement a dû conduire beaucoup d’entreprises pourvoyeuses de salariés détachés à régulariser leur situation. En réalité, une bonne partie de l’augmentation du recours au détachement s’explique sans doute par cette régularisation de la situation de travailleurs déjà présents précédemment.
Il n’est pas question de dire qu’il ne faut pas avoir recours au travail détaché – légal, bien évidemment –, parce que l’on a souvent besoin de faire appel à des compétences extérieures. Reste que c’est le différentiel de charges sociales, pouvant aller d’un à quatre entre la France et un autre pays du continent européen, qui justifie souvent le recours aux travailleurs détachés.
Contrairement aux deux orateurs précédents, je trouve l’article 45 important, car il prolonge et renforce ce qui a déjà été fait à la fois dans la loi Savary, d’initiative parlementaire, et dans la loi Macron, d’initiative gouvernementale. Ces deux textes ont donné des moyens législatifs et réglementaires pour s’attaquer à l’optimisation sociale et à l’intensification du recours à une main-d’œuvre à bas coût.
En imposant la prise en compte par l’employeur des coûts d’hébergement, de nourriture et de transport des salariés détachés, on agit évidemment sur la réduction des écarts de coût du travail. Au reste, madame la ministre, une étude récente de votre ministère, qui a été reprise dans la presse économique, confirme ce mouvement.
Il n’en demeure pas moins qu’il faut déployer des moyens de contrôle et de sanction importants pour parvenir à ce résultat.
Une meilleure solution serait, comme vous l’avez proposé lors d’un conseil à Bruxelles, d’inscrire dans une directive européenne le principe « à travail égal, salaire égal sur un même lieu de travail », donc de parvenir à un accord au niveau européen pour la révision en ce sens de la directive de 1996.
Nous savons que ce chantier n’est pas encore mené à terme, mais la France aura tout de même déjà, avec ce que vous nous proposez à l’article 45 du présent projet de loi, une législation plus solide et plus contraignante en matière de recours au travail détaché.