Vous avez évoqué une moitié de dommages couverts ; nous sommes plutôt à 75 ou 80 %, la France étant l'un des pays où la couverture est la plus élevée. Le législateur a voulu un dispositif universel : tous les biens sont couverts pour la catastrophe naturelle. C'est une assurance comme les autres, dans la mesure où la prime des bonnes années est mise à contribution dans les périodes plus difficiles. Le dispositif est entièrement encadré par la loi : les assureurs ne peuvent en moduler les garanties. Enfin, c'est une extension obligatoire à tous les contrats d'assurance. Le tarif est solidaire : le législateur a voulu qu'il soit le même pour tous, quelle que soit l'exposition du bien. Les assureurs ont la possibilité de se réassurer de manière illimitée auprès de la Caisse centrale de réassurance. La garantie ultime, en cas de sinistre qui mettrait à mal les bilans des assureurs et des réassureurs, est apportée par l'État.
Au cours des quinze dernières années, les aléas naturels ont coûté deux milliards d'euros par an aux assureurs et 1,5 milliard sur les 25 dernières années, tous périls confondus. Les inondations représentent un tiers de ce total. Les dégâts causés par le vent ont pesé le plus lourd. L'événement exceptionnel qu'est la tempête de 1999 a coûté 15 milliards d'euros à lui seul.
Les prévisions sont réalisées par des actuaires ; mais en matière d'aléas naturels, un même événement peut avoir des effets différents à dix ou vingt ans d'écart. Sur la base des scénarios du Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (Giec), des modèles climatiques, de nos connaissances sur l'évolution économique de notre pays, le coût des aléas naturels devrait être de 92 milliards d'euros sur les 25 prochaines années contre 48 milliards pour les 25 dernières. Ce quasi-doublement a trois raisons : l'enrichissement - plus de richesses entraînant plus de dégâts - ; un effet de répartition des richesses, une croissance de 10 % pouvant se traduire par une vulnérabilité augmentée de 30 ou 40 % en certains endroits ; et enfin, le changement climatique à proprement parler qui se traduira par des événements plus intenses et importants, en particulier dans les cas de submersion marine et de sécheresse. Une forte croissance des inondations est également prévue, mais pour des raisons liées à l'aménagement du territoire davantage qu'au changement climatique.
En matière de prévention et de protection, nous avons constaté que, depuis Xynthia, le ministère de l'environnement avait accéléré son action : affinement des outils de vigilance, mise en conformité avec la directive inondations, Papi de deuxième génération, fonds Barnier, autant d'outils appropriés pour une bonne politique de prévention. Le problème résiderait plutôt dans leur utilisation. Nous constatons bien souvent que les plans de prévention des communes remontent à fin des années 1990, quand la modélisation était embryonnaire ; il arrive aussi que le PCS n'ait pas été établi, or il divise par deux ou trois les conséquences financières d'un événement ; enfin, des plans de prévention sont absents ou non annexés au PLU. Les blocages locaux sont nombreux.
Nous avons élaboré un livre blanc contenant plusieurs propositions concrètes : individualiser l'information sur l'exposition aux risques et l'alerte au moment de l'événement, comme les assureurs le font auprès de leurs assurés ; former les jeunes à la culture du risque en étendant les actions évoquées à tous les collèges ; sensibiliser les entreprises au risque naturel et mettre en place auprès d'elles l'équivalent des PCS.