Madame la ministre, madame, monsieur les rapporteurs, madame la présidente de la commission, mes chers collègues, nous allons pouvoir adopter les conclusions de la commission mixte paritaire sur ce texte, qui termine enfin son long parcours commencé pendant l’année 2013.
Ce vote est important au moment où, en France, comme dans toute l’Europe, les sociétés sont secouées par des polémiques, déchirées par des fractures et des violences de toutes sortes, physiques et verbales. Ceux qui veulent attiser la haine se servent très souvent de la culture comme d’une cible.
Dans un tel climat, il n’est pas anodin que nos deux assemblées se rapprochent et tendent vers l’unanimité pour envoyer un message d’unité dans le domaine de la création artistique et de la défense de notre patrimoine.
Finalement, quand nous prenons le temps du débat pour nous écouter mutuellement et élaborer un projet collectif, nous pouvons nous rassembler. En effet, l’intelligence rassemble, alors que la simplicité des polémiques auxquelles les politiques succombent parfois dans le débat public divise inutilement.
Il me paraît important de le souligner au seuil d’une période électorale au cours de laquelle je crains que la culture ne soit utilisée pour créer des fractures, au moyen de thématiques comme celle de l’identité. Or la culture est au cœur de notre identité républicaine. Eh bien, nos assemblées ont anticipé ! Elles ont montré que, si nous voulons travailler sérieusement dans l’écoute mutuelle, nous sommes capables, nous les républicains, d’envoyer un message commun tout à fait salutaire, et c’est cela que je veux saluer !
Le groupe socialiste et républicain du Sénat – au nom duquel je parle ici – a voulu être ce pont entre deux assemblées dont les majorités ont des options différentes. Nous avons su nous rassembler sans esquiver aucun des débats qui pouvaient cliver et nous séparer a priori, en défendant jusqu’au bout, les uns et les autres, des positions et des convictions.
Ainsi, je suis très content que nous ayons réussi à convaincre nos collègues de la majorité sénatoriale de l’importance d’une politique ambitieuse de service public en matière culturelle. Qu’elle relève de l’État ou des collectivités territoriales, elle doit, bien entendu, comme le souhaitait M. le rapporteur, être conduite en concertation avec tous les acteurs de la création, qu’ils interviennent à l’échelon national ou local. Ce débat était important.
Je suis également fier d’avoir proposé, au nom du groupe socialiste et républicain, l’adoption d’un article additionnel après l’article 1er bis qui acte la liberté de la diffusion de la création artistique. C’est bien cette liberté de diffusion qui est menacée quand des extrémistes s’attaquent à la création de façon illégale et violente, quand ils s’en prennent à une exposition ou veulent empêcher une représentation d’opéra ou de théâtre. Ce genre d’action se multiplie et cette intolérance se manifeste, au-delà de la France, dans toute l’Europe.
La liberté de diffusion est également menacée quand le système est menacé par la concentration voulue par ceux qui détiennent les moyens de diffusion. À quoi bon affirmer la liberté de création, si l’on ne peut pas être exposé, vu ou entendu, parce que ceux qui détiennent les moyens de diffusion uniformisent la culture à force de diffuser toujours la même chose ? Dès lors, la diversité, qui est l’essence de la création, est menacée. Assurer la liberté de diffusion, c’est donc aussi apporter une réponse à ce phénomène majeur auquel nous sommes confrontés.
Un tel compromis n’est possible qu’avec l’intervention d’acteurs. Je veux saluer les rapporteurs du Sénat qui ont très vite, après les polémiques intervenues en première lecture, pris le parti de chercher à aboutir à un texte commun – c’était à la fois un pari et une affaire de volonté !
Je veux souligner le rôle primordial joué par Mme la ministre, qui s’est inscrite dans cet état d’esprit et a permis le succès de la méthode. Les groupes de l’opposition, qui sont majoritaires au Sénat, avaient besoin d’avoir confiance pour garder intacte cette volonté. Madame la ministre, votre rôle a été important, parce que vous avez su créer cette confiance sans rien lâcher sur le fond de ce texte et sans rien renier de ses ambitions.
Certes, j’entends ceux qui constatent qu’un accord s’est dégagé pour voter ce texte et s’emploient à le déprécier, au motif qu’il ne serait pas la grande loi attendue. Eh bien, nous attendrons ! Peut-être ceux qui sont aujourd’hui dans l’opposition reviendront-ils un jour aux affaires : nous verrons quelles grandes lois ils nous proposeront sur la culture. Si tel est le cas, je peux vous assurer que nous serons toujours au rendez-vous parce que le groupe socialiste et républicain du Sénat répond toujours « présent » quand il s’agit de défendre et de promouvoir la culture !
Je vous remercie, en tout cas, madame la ministre, d’avoir fait preuve de cet état d’esprit constructif.
Je tiens à souligner le rôle qu’ont joué, au sein du groupe socialiste et républicain, celles qui ont été les chevilles ouvrières de ce travail d’équipe. Je veux parler de Maryvonne Blondin, de Sylvie Robert et de Marie-Pierre Monier, laquelle complètera les propos que je viens de tenir en évoquant les dispositions du texte relatives à l’architecture et au patrimoine.
Je me félicite que notre groupe ait pu apporter un certain nombre d’éclairages, notamment sur les articles 7 quater A, 8 et 9 quater. Je pense aussi à l’article 7 bis AA et à la nécessaire réglementation d’une innovation en ce qui concerne le cloud. Nous avons fait des propositions visant à renforcer les pouvoirs et l’indépendance du Centre national du cinéma et de l’image animée dans la lutte contre le piratage. Nous avons enrichi le texte sur le quatrième champ multiprofessionnel du spectacle vivant et enregistré. Ce n’est pas rien !
Certains sujets, peut-être parce qu’ils étaient moins polémiques, ont trouvé moins d’échos sur le plan médiatique. Je veux parler des droits, notamment sociaux, pour les professionnels du spectacle, qui ont trouvé ici une écoute.
Sans détailler davantage tous les apports du groupe socialiste et républicain, je me contenterai de dire que, au fil des débats en commission et en séance, 65 de nos amendements ont été retenus et intégrés à la rédaction du Sénat. On en retrouve 38 dans le texte final de la commission mixte paritaire. Il faut y ajouter une vingtaine de nos amendements qui ont, certes, été réécrits, mais dont l’esprit a été respecté, puisque le fond des dispositions qu’ils proposaient a été maintenu. Le groupe socialiste et républicain a donc l’impression d’avoir apporté sa contribution au travail commun.
Je voudrais, avant de terminer, revenir sur l’article 10 quater, qui concerneles photographes et les arts visuels. Sur cette question importante, je vous demande, madame la ministre, d’adresser une notification à la Commission européenne, conformément à la jurisprudence Uber, afin que nous puissions conforter cette conquête pour les arts visuels, vivement attendue par les artistes concernés.
Pour toutes ces raisons, nous voterons, bien entendu, les conclusions de la commission mixte paritaire.