Monsieur le sénateur François Marc, je vous demande de bien vouloir excuser l’absence de Mme la ministre du logement et de l’habitat durable, qui est ce matin à l’Assemblée nationale pour l’examen du projet de loi Égalité et citoyenneté.
Vous l’interrogez sur la possibilité d’expérimenter en Bretagne, peut-être, plus spécifiquement, dans le Finistère, une extension du zonage Pinel aux villes moyennes.
Le dispositif Pinel a pour finalité le développement de l’investissement locatif des particuliers dans l’immobilier ; il s’agit d’ailleurs d’un élément essentiel de la relance actuelle du secteur. Ce dispositif est le fruit d’un calibrage précis, qui permet de renforcer le secteur intermédiaire dans les zones tendues, c’est-à-dire les zones A, A bis et B1.
La dérogation que vous proposez reviendrait à ouvrir le dispositif aux communes classées en zone C.
Mme la ministre tient tout d’abord à rappeler que le zonage actuel a bénéficié d’une révision récente, publiée en 2014, qui a permis de lier très finement la cohérence du dispositif avec les dynamiques territoriales et la demande de logement. Le zonage mis en œuvre depuis cette date a vocation à garantir l’efficacité et la bonne adaptation de cette mesure fiscale.
À cet égard, le Gouvernement craint que la mise en place de cette expérimentation ne revienne à introduire une rupture d’égalité devant l’impôt. Mme la ministre attire ainsi votre attention, monsieur le sénateur, sur le cas de particuliers ayant investi dans un dispositif Scellier en zone B2, et qui doivent aujourd’hui faire face à de véritables difficultés financières, dues à l’absence de locataires. Le bénéfice fiscal devient nul et la revente souvent impossible.
En outre, élargir l’accès à ces produits d’investissement locatif pourrait entraîner, dans des communes à faible tension locative, une déstabilisation du marché du logement. Certains dispositifs d’investissement locatif, dans le passé, ont ainsi été à l’origine de processus inflationnistes importants. Il paraît donc primordial de prévenir ces situations en maintenant un zonage adapté aux marchés locaux de l’habitat.
Le Gouvernement précise également que, en Bretagne, la zone C recouvre plus d’un habitant sur deux et plus de 80 % des communes. Ces chiffres matérialisent l’enjeu budgétaire d’une éventuelle ouverture, même maîtrisée, du dispositif fiscal en question. L’enjeu est d’autant plus important qu’une dérogation accordée aux territoires situés en zone C, mais non à ceux qui sont situés en zone B semble peu crédible ; or ces derniers concernent, pour leur part, un habitant sur trois.
Enfin, le Gouvernement s’interroge sur l’opportunité de lancer une telle expérimentation. En effet, les niveaux de loyers pratiqués dans beaucoup de villes moyennes bretonnes ne justifient pas d’actionner un levier d’incitation fiscale.
L’instauration d’un tel dispositif ne permettrait d’ailleurs pas non plus de répondre à une préoccupation qui se trouve plus souvent relayée par les élus de votre territoire, monsieur le sénateur, à savoir la vacance du bâti ancien. Sur le sujet des centres dégradés, le Gouvernement travaille avec les parlementaires et les élus de Bretagne. Cette collaboration tend à montrer que la solution se trouve plutôt dans les dispositifs d’aide à la réhabilitation ou d’accession à la propriété. Autrement dit, il est préférable, pour répondre de manière adaptée aux besoins localisés et aux demandes émergentes, de mettre en œuvre d’autres types de dispositifs, notamment par le biais d’Action logement.
Vous comprendrez donc, monsieur le sénateur, que les efforts du Gouvernement se porteront plutôt sur ces politiques en faveur des zones détendues. C’est déjà en ce sens qu’il agit par le programme de revitalisation des centres-bourgs ou par le PTZ, le prêt à taux zéro, dans l’ancien avec travaux. L’ouverture du dispositif Pinel à de nouveaux territoires ne semble pas susceptible de contribuer de manière satisfaisante à répondre aux spécificités de l’aménagement de votre territoire.