Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous nous retrouvons aujourd’hui autour d’une proposition de loi visant à mettre en place des outils de gestion des risques en agriculture.
Depuis toujours, et partout dans le monde, l’activité agricole est exposée à de nombreux aléas naturels. Les aléas climatiques touchent de manière dramatique certains pays, notamment du Sud –je pense en particulier aux pays affectés par l’avancée des zones désertiques. Ils doivent aussi être l’une de nos préoccupations. Dans notre pays, un certain nombre de réponses ont été apportées, notamment pour lutter contre les risques climatiques, sanitaires ou environnementaux.
Mais aujourd’hui, dans une économie mondialisée, dérégulée, les agriculteurs doivent aussi faire face à un risque économique lié aux fluctuations du marché.
Pendant des décennies, la politique agricole commune a permis une certaine stabilité des prix agricoles en mettant en place de puissants outils de régulation. La dérégulation progressive résulte des choix politiques qui ont été faits, tournés vers les volumes plutôt que vers la qualité et, pour une part importante, vers l’exportation plutôt que de répondre prioritairement aux besoins des populations européennes.
On ne refait pas l’histoire, mais il importe de la rappeler. Ces orientations sont dues aussi à l’influence majeure de ce que l’on a coutume d’appeler la profession, ou du moins sa représentation majoritaire, et de tout un système, toute une organisation qui tourne autour, soucieuse avant tout de défendre ses propres intérêts… Il faut se souvenir que, depuis des années, une partie de la profession agricole, certes minoritaire, et une partie du monde politique, certes très minoritaire, ont tenté de tirer la sonnette d’alarme, sans avoir été entendues.
Pour en revenir au texte qui nous est proposé, son objectif majeur est d’offrir de nouveaux outils aux agriculteurs pour prévenir et gérer les risques, et de poser les bases du débat sur la future réforme de la politique agricole commune d’après 2020. Il vise aussi à préparer le rendez-vous à mi-parcours de la PAC en 2018 qui doit permettre aux États membres de faire de nouveaux arbitrages sur la manière d’appliquer la PAC.
Aujourd’hui, telle qu’elle fonctionne, l’Europe n’est plus à même d’assurer ses objectifs, inscrits dans le traité de Rome, sans une profonde remise en question des fondements même de l’Organisation mondiale du commerce, basée sur un libéralisme sans contrainte pour lequel la concurrence est religion !
Puisque j’évoque l’esprit initial de la PAC, je voudrais en profiter pour saluer la mémoire d’Edgar Pisani, l’un des pères fondateurs de la politique agricole commune, qui vient de nous quitter. Il a eu la lucidité et l’honnêteté intellectuelle de reconnaître les dérives de celle-ci, et de plaider ensuite pour une gouvernance mondiale de l’alimentation. Il faudra bien que l’on y arrive. Là aussi, il y a urgence ! Dans le domaine de l’alimentation, les règles de l’OMC sont humainement inacceptables.
Revenons au texte : à l’article 1er, les auteurs proposent la création, dans chaque région, d’un fonds de stabilisation des revenus agricoles. Cette mesure nous convient, mais nous émettons toutefois nous aussi une réserve sur le choix d’un échelon régional.
L’article 2 concerne les modalités de financement via un rapport du Gouvernement. Les pistes de réflexion pour trouver les fonds nous conviennent : la contribution des agriculteurs eux-mêmes, à condition que celle-ci soit équitable et solidaire ; l’augmentation de la taxe sur les surfaces commerciales, bien évidemment ; la mise en place d’une taxe sur les transactions financières agricoles – même si nous n’y sommes pas encore arrivés, on l’évoque enfin ! ; l’augmentation de la taxe sur la cession de terrains agricoles rendus constructibles, dans la mesure où l’aide à l’installation de nouveaux agriculteurs, déjà financée par cette taxe, n’est pas affectée par cette mesure.
L’ensemble des propositions de ce texte d’appel va dans le sens d’une réponse positive aux nécessaires mesures d’urgence ; ces dispositions posent également les bases du débat sur la réorientation de la PAC actuelle et de la préparation de la PAC d’après-2020.
Aussi, au nom du groupe écologiste, j’émettrai un vote favorable sur cette proposition de loi.
En conclusion de mon propos, je voudrais citer M. le rapporteur qui, à la page 26 de son rapport bien argumenté, indique : « Votre rapporteur souligne qu’une autre réponse à la volatilité des marchés agricoles réside non pas dans des politiques publiques de soutien, mais dans la recherche d’une plus forte résilience des exploitations aux risques, à travers des choix de productions diversifiées, des modèles de développement raisonnables, et des investissements mesurés. »
C’est pour nous une part de la définition d’une agriculture familiale et paysanne, moderne et progressiste, diversifiée, en polyculture élevage, pratiquant le système herbager, ancrée sur son territoire pour des productions de qualité, de proximité, respectueuse des équilibres environnementaux et génératrice d’emplois. Cette agriculture sera également rémunératrice pour les producteurs, agriculteurs et éleveurs. C’est une rupture avec le discours ambiant qui nous fait plaisir.
J’ai apprécié de vous lire, monsieur le rapporteur, et renouvelle le vote favorable des écologistes.