Intervention de François Pillet

Réunion du 4 juillet 2016 à 21h30
Transparence lutte contre la corruption et modernisation de la vie économique - orientation et protection des lanceurs d'alerte — Article 6 C, amendement 314

Photo de François PilletFrançois Pillet, rapporteur :

L’amendement n° 314 de notre collègue Alain Anziani est peut-être le plus fondamental, puisqu’il vise à réécrire le dispositif du signalement de l’alerte dans un sens contraire à la position défendue par la commission. Or cette dernière est très attachée à sa position.

Cher collègue, je comprends vos préoccupations. Je vous demande toutefois de bien vouloir retirer votre amendement : je pense que la liste d’acteurs que vous proposez est inadaptée.

J’évoquerai ce seul point : pourquoi un signalement devrait-il être adressé à une association ? De quel pouvoir est dotée l’association pour arrêter le délit ou le crime ? Aucun, bien entendu. Tout lanceur d’alerte peut évidemment s’adresser à une association, mais une communication à une association ne saurait en aucun cas être considérée comme une étape « normale » de la procédure de signalement. En outre, une association n’est pas habilitée à connaître un secret protégé par la loi.

Enfin – vous avez pu constater, cher collègue, que ce point risquait de faire problème dans la suite du débat –, cet amendement tend à replacer le Défenseur des droits, à son corps défendant, ainsi que les instances représentatives du personnel, au même rang que l’autorité judiciaire.

Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement. Au bénéfice de la modération de mes propos, peut-être M. Anziani acceptera-t-il de le retirer.

Madame Assassi, vous proposez, avec l’amendement n° 438, une réécriture du dispositif du signalement de l’alerte.

En vertu de cette réécriture, l’information devrait d’abord être transmise soit à l’employeur, soit aux instances représentatives du personnel, soit à la « personne de confiance ». Cette hiérarchie du signalement me semble inappropriée – j’ai déjà expliqué la position de la commission concernant les instances représentatives du personnel. Mon avis est donc défavorable sur cet amendement.

Monsieur Collombat, avec l’amendement n° 538 rectifié, vous proposez de supprimer le terme « éthique ». La commission a considéré qu’il n’était en effet sans doute pas nécessaire de le maintenir, et cela quand bien même l’éthique doit bel et bien constituer un élément majeur dans la motivation et la décision du lanceur d’alerte. La commission émet donc un avis favorable.

L’amendement n° 439 vise à réintroduire le rôle des instances représentatives du personnel dans la procédure de signalement. Celles-ci ne sont pourtant pas des autorités administratives ou judiciaires aptes, comme telles, à juger de la véracité ou de la fausseté du signalement.

Par ailleurs, après tout, cela n’empêche en rien les instances représentatives du personnel d’œuvrer à la mise en place d’une procédure interne de signalement : elles sont ainsi parfaitement dans leur rôle. Mais il s’agit d’un problème distinct. Pour cette seule raison, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Madame Blandin, avec l’amendement n° 380, vous conditionnez la possibilité de s’adresser aux instances publiques ou au Défenseur des droits aux seuls cas de « risque imminent ». En définitive, votre rédaction est extrêmement restrictive ; elle est donc contraire à la vision plus large qui est celle de la commission. Mon avis est donc défavorable.

Il est défavorable également pour l’amendement n° 381 : chère collègue, vous intégrez deux nouveaux acteurs dans la procédure, dont le premier, « un professionnel », me paraît excessivement large.

Quant à l’amendement n° 382, il vise à remplacer le délai de trois mois par un délai « raisonnable ». Qu’est-ce qu’un délai « raisonnable » ? Trois mois peuvent paraître en effet trop longs ; néanmoins, la notion de « délai raisonnable » me semble trop sujette à des jurisprudences parfois diverses et évolutives…

En outre, ce délai de trois mois n’a pas été choisi au hasard : il s’agit du délai d’attente nécessaire, à compter du dépôt d’une plainte devant le procureur de la République, à partir duquel il devient possible, en l’absence de réponse, de saisir le juge d’instruction. Ce choix relève donc d’une certaine cohérence. La commission émet donc un avis défavorable.

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