Intervention de Élisabeth Lamure

Réunion du 5 juillet 2016 à 14h30
Transparence lutte contre la corruption et modernisation de la vie économique – orientation et protection des lanceurs d'alerte — Article 8

Photo de Élisabeth LamureÉlisabeth Lamure :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet article 8 prévoit, pour une société qui emploie au moins 500 salariés et dont le chiffre d’affaires dépasse 100 millions d’euros, une obligation de prendre « des mesures destinées à prévenir et détecter, en France ou à l’étranger, les faits de corruption ou de trafic d’influence ».

Or, il y a seulement quelques semaines, l’Assemblée nationale adoptait une proposition de loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères, qui oblige aussi à établir un plan de vigilance, visant notamment « à prévenir les comportements de corruption ». Cette obligation s’applique aux entreprises de plus de 5 000 salariés, filiales françaises comprises, ou 10 000 salariés, si l’on inclut les filiales étrangères.

Le plan de vigilance prévu dans la proposition de loi ne vise pas seulement à prévenir la corruption, mais aussi « les risques d’atteinte aux droits humains et aux libertés fondamentales, les dommages corporels ou environnementaux graves, ou les risques sanitaires ». Il englobe, en plus, les risques issus des sociétés que l’entreprise contrôle, et même les activités de ses « sous-traitants ou fournisseurs ».

Ces deux textes, le projet de loi Sapin II et la proposition de loi Vigilance, établissent en fait des obligations difficilement compatibles.

Le cabinet ATEXO, à qui la délégation aux entreprises a demandé une étude décrivant la portée économique de cette proposition de loi, a déjà estimé que celle-ci concernerait entre 146 et 243 entreprises, plus leurs filiales. C’est peu, mais ces entreprises représentent tout de même plus de 4 millions de salariés, plus de 33 % de la valeur ajoutée produite en France et plus de 50 % du chiffre d’affaires à l’export !

Or le même cabinet estime le nombre d’entreprises relevant de l’article 8 du projet de loi Sapin II à 2 850 ! Le projet de loi se concentre sur la corruption, alors que la proposition de loi Vigilance multiplie les éléments à prendre en compte dans le plan de vigilance, avec des intitulés très larges. C’est un nid à contentieux, qui crée une très grande incertitude pour les entreprises.

Le projet de loi que nous examinons est moins déraisonnable de ce point de vue, même s’il l’est davantage pour le nombre d’entreprises concernées, soit 2 850. Ce sont pourtant les grandes entreprises actives à l’international qui sont le plus exposées à la corruption. Ce ne sont pas les ETI d’à peine plus de 500 salariés que l’article 8 doit viser – ces entreprises dont nous avons justement besoin pour renforcer notre tissu industriel !

C’est pourquoi je défendrai notamment un amendement qui prévoit de relever ce seuil.

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