Le projet de loi relatif à la biodiversité ancre de plus en plus fortement le droit de l’environnement dans des principes forts et séculaires de notre droit. Certains des débats à venir vont le montrer, tous les principes ne sont pas parvenus à la même maturité juridique. Je prends volontairement l’exemple du principe de non-régression, dont je partage l’ambition, tout en pensant qu’il n’a pas la maturité juridique nécessaire pour entrer dans notre droit positif, à l’heure où je vous parle.
Je pense également à la révolution juridique que représente l’inscription de la réparation du préjudice écologique dans notre code civil. C’est un moment important, dont nous nous souviendrons, tous, pendant quelques années ; je serais tenté de dire qu’il est fondateur. Et je tiens à saluer le président Bruno Retailleau, qui est à l’origine de cette innovation.
Grâce au Sénat, cette loi va créer du droit, au sens le plus noble du terme. Nous allons inscrire dans le droit positif, dans les parties les plus sensibles et les plus anciennes du code civil, des dispositions qui étaient jusqu’alors de nature jurisprudentielle.
En effet, la protection de la biodiversité, des espèces et des sites passe également par un renforcement de notre droit de la responsabilité et par des innovations juridiques qui adaptent notre droit aux évolutions des risques encourus par nos écosystèmes, qui ont malheureusement souvent une origine anthropique. L’homme doit être capable de réparer les dommages qu’il cause à l’environnement et, ce faisant, qu’il se cause à lui-même, à son avenir et à celui de la planète. La réparation du préjudice écologique « pur », c’est-à-dire celui qui est subi par l’environnement en tant que tel, va désormais entrer dans notre droit.
Le Sénat avait déjà adopté à l’unanimité, en 2013, la proposition de loi de M. Retailleau. Il fait encore aujourd’hui preuve de son exigence et de sa rigueur en renouvelant ce geste important.
J’ai travaillé en binôme avec Alain Anziani, qui est membre de la commission des lois et qui avait été le rapporteur de la proposition de loi de 2013. Nous avons entendu nombre d’acteurs, de juristes, de professeurs, de magistrats, mais aussi des représentants des entreprises, des assurances ou encore des associations.
Or nous sommes parvenus, je le crois, à un bon équilibre, efficace et rigoureux. En effet, la tentation est parfois grande, y compris pour nous, législateurs, de ne pas faire confiance au juge, de nous prémunir contre des risques imaginaires, d’écrire en trois alinéas ce qu’une phrase pourrait contenir, de prévoir dans la loi des mesures d’ordre réglementaire qui, au contraire de l’objectif visé, fragilisent le dispositif.
Nous avons donc souhaité simplifier le dispositif, ne pas confondre code civil et code de procédure civile et, surtout, laisser au juge la possibilité de faire son travail. D’ailleurs, comme nous l’a montré la jurisprudence de l’Erika, le juge n’a pas attendu le législateur pour reconnaître la réparation du préjudice écologique !
Notre rédaction s’appuie donc sur quatre éléments principaux.