Je vais rappeler, comme l’a fait M. Cardoux, l’historique de ce débat.
Le principe de non-régression est si important et considérable que nous avons régressé nous-mêmes en ne l’adoptant pas. Le Sénat a d’ailleurs été, à cette occasion, stigmatisé par les commentateurs.
Ce principe est si important qu’il ne figurait pas dans le texte initial du Gouvernement ! S’il était si fondamental, pourquoi n’était-il pas inscrit dans ce projet de loi, présenté comme un monument de la législation sur la nature ? Cela m’interpelle. Mais poursuivons.
Le député UDI Bertrand Pancher avait proposé, en première lecture, que soit remis un rapport sur le principe de non-régression. J’y étais favorable, comme le rappelle de temps en temps Jean-Noël Cardoux. Je considérais en effet, et je considère toujours, que ce principe est intéressant et qu’il intégrera probablement un jour notre droit national. Il est, d’ores et déjà, de plus en plus présent dans le droit international. Mais sans doute était-il utile d’y réfléchir avec des universitaires, des magistrats et des avocats avant que de l’inscrire dans le droit positif.
Le Sénat, au lieu d’adopter conforme la proposition de notre collègue député, a cru malheureusement utile de la supprimer. Moyennant quoi, lorsque le texte est reparti à l’Assemblée nationale, les députés ont décidé, au travers d’un amendement déposé par Delphine Batho, non plus de la remise d’un rapport, mais de l’inscription du principe de non-régression dans le projet de loi. L’étude d’impact ne prévoit pourtant rien à ce sujet, ce qui est normal puisque les députés n’étaient pas à l’origine du texte.
Nous sommes donc à ce jour – pour ma part, c’est mon cas – incapables d’évaluer quel serait l’impact de l’introduction d’un tel principe. Je vous renvoie, à cet égard, au débat que nous avons eu sur l’introduction d’une règle déclarative et très peu – pour ne pas dire pas du tout – normative.
Inscrire ce principe dans le projet de loi risque d’être contre-productif et nous introduirions beaucoup de complexité en adoptant une définition mal évaluée. C’est la raison pour laquelle nous avons supprimé cette disposition en commission, la semaine dernière, sur mon initiative.
Mes collègues Les Républicains avaient soutenu, et même réclamé, à longueur de séances la suppression de ce principe, non pas pour les mêmes raisons que moi, mais parce qu’ils craignaient que celui-ci ne nuise aux acteurs économiques et à ceux de diverses activités sociales, par exemple les chasseurs. Or, aujourd’hui, ils veulent le réintroduire. J’ai donc un peu de mal à comprendre, car je suis pris en ciseaux des deux côtés !
En même temps qu’ils souhaitent réintroduire le principe de non-régression, ces collègues veulent l’assortir de considérations, certes pertinentes, mais qui ne répondent pas à l’argumentation que je développe depuis le début de nos travaux. Ce que je recommande, en effet, c’est de réfléchir à ce qui est sous-tendu par ce principe, à ce qui se passera lorsque nous l’aurons inscrit dans notre droit positif et à la façon d’en tirer des conséquences utiles. Lorsque nous aurons procédé à tout cela, je serai le premier à proposer son introduction !
J’émets donc un avis défavorable sur les amendements identiques n° 1 rectifié et 7 rectifié.
La commission est en revanche favorable à l’amendement n° 44 rectifié, auquel je suis défavorable à titre personnel.
Pourquoi, sur cet amendement, la commission a-t-elle émis cet avis favorable au lieu de me suivre ? Tout simplement parce que lorsque nous nous sommes réunis, ce matin, je me suis retrouvé en situation de minorité ; je n’ai donc pas été en mesure de faire valoir mon point de vue.