Intervention de Valérie Pécresse

Réunion du 11 juillet 2007 à 15h00
Libertés des universités — Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Valérie Pécresse, ministre :

Que l'on me comprenne bien : j'ai tout à fait conscience que l'université doit accueillir un public très hétérogène et que le parcours scolaire des jeunes bacheliers ne les prépare pas à une formation académique de haut niveau, en tout cas pas tous et pas immédiatement. Prenons donc nos bacheliers comme ils sont, donnons-leur les connaissances et les compétences à la mesure de leurs talents et des besoins de la société.

Le Premier ministre, qui connaît parfaitement toutes ces questions, l'a rappelé dans son discours de politique générale : la réussite ou l'échec se joue dans les premiers mois de la vie universitaire. C'est pourquoi le projet de loi présenté par le Gouvernement tend à confier deux nouvelles missions aux universités, et non des moindres : l'orientation ? une orientation active ! ? et l'insertion professionnelle.

Dès lors qu'ils envisagent de poursuivre des études supérieures, nos élèves ont besoin d'une information complète et transparente, à la fois sur les exigences des formations qu'ils abordent et sur les possibilités d'insertion qu'elles leur offrent à plus ou moins long terme.

Au début de leur parcours universitaire, les étudiants doivent rencontrer de véritables équipes pédagogiques qui leur proposent une formation à la fois exigeante, respectueuse de la diversité de leurs talents et ouverte sur le monde de l'emploi.

Reconnaître l'inégalité des situations pour donner plus à ceux qui ont moins, avoir une véritable politique de formation compensatrice, ouverte sur des champs de connaissance élargis : voilà les défis qui attendent l'université de demain dans le pacte social qui la lie à la nation.

Un diplôme porteur d'espoir pour tous, accessible au plus grand nombre et qui soit un véritable tremplin vers un emploi ou vers la poursuite d'études, voilà ce que doit être la licence de demain.

C'est dans ces conditions, et dans ces conditions seulement, que l'on pourra, sereinement, faire du mastère et du doctorat les formations d'excellence dont la France a besoin, destinées aux meilleurs et aux plus motivés des étudiants français et étrangers.

L'université, en effet, a deux missions, à la fois complémentaires et, pour une part, antagonistes, car elle doit, selon l'heureuse formule d'Edgar Morin, « s'adapter à la société et adapter à soi la société». À mes yeux, il n'est question de renoncer ni à l'une ni à l'autre.

L'université doit aussi avoir l'ambition de l'excellence, d'une promotion par le mérite et le talent ; plus de la moitié de la recherche en France se fait dans nos universités, qui ont besoin de trouver, dans les rangs de leurs étudiants, les chercheurs de demain.

Ces jeunes chercheurs doivent pouvoir s'exprimer pleinement, être attendus sur les campus du monde entier et avoir envie de revenir dans les laboratoires français. Nous avons besoin d'eux, mais ils ont aussi besoin de nous, nous les responsables politiques de ce pays qui avons entre les mains une partie de leur destin.

Nous avons l'éminent devoir de leur donner la part belle, comme à l'ensemble des personnels de l'université, sans lesquels nous ne pouvons prétendre la rebâtir.

Refonder l'université est une exigence nationale qui doit s'accompagner d'une politique d'aide sociale aux étudiants plus ambitieuse et plus équitable, et, pour tous, de conditions de travail comparables à celles des grands campus du monde développé.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous propose sans plus tarder de retourner la célèbre phrase de Max Weber ? « la politique n'a pas sa place dans une université ! » ?, en donnant toute sa place à l'université dans le débat républicain.

Je vous soumets aujourd'hui le projet de loi relatif aux libertés des universités avec beaucoup de fierté : la fierté de porter devant vous l'ambition tout entière d'un peuple qui fait le pari de la connaissance et qui a confiance en ses élus pour faire de ses rêves la réalité de demain.

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