Intervention de Philippe Mauguin

Commission des affaires économiques — Réunion du 13 juillet 2016 à 11h15
Audition de M. Philippe Mauguin candidat proposé aux fonctions de président de l'institut national de la recherche agronomique

Philippe Mauguin, candidat proposé par le président de la République aux fonctions de président de l'Institut national de la recherche agronomique (Inra) :

Oui, et tant mieux ! Cette audition devant le Parlement est parfaitement justifiée par l'importance du poste. Mais il n'y avait pas, à l'époque de procédure d'appel à candidatures. Je n'ai rien contre François Houllier, dont je respecte le travail. Mais cela ne signifie pas qu'à partir du moment où il est en place, il ne faudrait aucun autre candidat, alors que pour la première fois un appel à candidatures est publié au Journal officiel. Je me suis interrogé sur ce sujet et sur celui du conflit d'intérêts. Je suis allé voir le Secrétaire général du Gouvernement, M. Guillaume, pour savoir si je pouvais me présenter, en tant que directeur de cabinet, fonctionnaire, d'un ministère de tutelle de l'Inra. Il m'a assuré de l'absence de problème. Je ne suis pas juriste. La question d'un éventuel conflit d'intérêt entre les intérêts publics et privés lié à l'enchaînement de postes sera examinée par la Haute Autorité, mais cela ne relevait pas de ce registre. Après l'appel à candidatures, j'ai travaillé chez moi, durant un mois, à partir de documents disponibles sur internet, pour remettre mon dossier de candidature le 13 juin. Quelques jours plus tard, j'étais auditionné, de même que François Houllier, par la commission d'experts. Ma candidature n'est donc nullement un acte contre François Houllier mais la marque d'un intérêt personnel très important pour l'Inra.

Si j'obtiens votre confiance, je n'aurai aucun esprit de revanche ou partisan et je garantirai l'indépendance des chercheurs. En tant que fonctionnaire, j'ai travaillé avec des gouvernements de droite et de gauche, dans d'excellentes conditions. Michel Barnier m'a nommé directeur des pêches maritimes et j'ai travaillé avec Bruno Le Maire. Je ne me suis pas engagé en politique, même si je respecte éminemment vos fonctions, et je suis toujours resté dans mon domaine. Certes, j'ai reçu le tract de Sud Recherche, syndicat pas toujours amène envers ce Gouvernement, l'un des syndicats représentatifs de l'Inra, qui évoque des choix pour l'Inra, avec lesquels je ne suis pas en désaccord, et pose des questions de déontologie. Je ne ferai pas de chasse aux sorcières ; ce n'est pas mon esprit. Mais il faut retrouver de la sérénité, respecter la confiance démocratique, et apaiser, réunir, travailler avec les équipes de direction sur les vrais sujets intéressant les chercheurs et les agents de l'Inra. Les priorités sont les financements, les partenariats, les métiers des chercheurs et leur attractivité, pour une communauté de travail encore plus forte demain. Retrouvons de la sérénité, telle est ma première priorité avec l'équipe de direction et les représentants du personnel et tous les centres. François Houllier a des mérites et fait bien son travail, je souhaite juste être jugé sur mon projet.

Je suis heureux que dans un contexte difficile et après quelques tensions lors d'annulations de crédits, ce Gouvernement ait choisi de confirmer ces moyens et même d'augmenter le budget de la recherche en 2017. Face aux défis à relever, je ne veux pas mener une politique de réduction des dépenses publiques. Comme dans d'autres établissements publics, sous votre contrôle, il faut être efficient, justifier les postes et les choix, mais sans réduire les coûts, et être meilleur avec le même budget, voire un peu plus si l'on peut obtenir de l'argent des appels à projet du programme d'investissements d'avenir, de l'Agence nationale de la recherche et des programmes européens.

L'agriculture biologique et le lien avec l'agro-écologie sont un point important et non partisan : ce sujet a été évoqué par le HCERES comme devant être conforté à l'Inra. L'Inra n'est pas assez présent auprès des petits acteurs - les PME, les instituts techniques, les réseaux d'agriculteurs innovants. C'est dur mais il faut le faire. Il existe des laboratoires vivants, procédure proposée par le programme d'investissements d'avenir.

Oui, les chercheurs sont soumis à des pressions de toutes formes. Ils sont libres dans leurs choix de recherche et indépendants dans leurs activités. Leur activité scientifique doit se faire sans pression ; ils sont évalués par leurs pairs. Ainsi, l'on ne peut tronquer un rapport sur les néonicotinoïdes dans un établissement public. Les données de l'Inra doivent être accessibles à tous. L'impact des néonicotinoïdes sur les abeilles n'est ni simple ni binaire, même si les médias exigent souvent que l'on réponde par oui ou par non à des questions éminemment complexes. La fierté et la force des chercheurs consistent à rendre intelligible et claire la réalité de la connaissance scientifique, sans pression.

Le comité d'éthique, mis en place par Marion Guillou et présidé par Louis Schweitzer puis Axel Kahn, est une très belle idée, un beau lieu de réflexion partagée entre l'Inra, le Centre de coopération international en recherche agronomique pour le développement (Cirad) et l'Ifremer. Les chercheurs doivent faire de l'innovation, être des acteurs économiques sans être sous influence, tout en restant ouverts dans leurs publications et parfois aussi accepter d'être pris à partie. Comment faire ? D'autres sujets comme l'évolution des biotechnologies et leurs nouvelles formes seront débattus devant ce comité.

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