Pour notre part, nous ne comprenons pas une telle complexité, alors qu’il aurait été plus simple d’étendre encore la période de transition ou de permettre à ces abonnés de garder leur fournisseur au prix du marché.
En effet, le 29 juin, le nombre de clients concernés par l’échéance du 31 décembre 2015 était de 15 500 sur 576 000. C’est d’ailleurs pourquoi la prolongation de l’offre transitoire a été envisagée par les acteurs, compte tenu de la diminution rapide du stock de consommateurs qui n’avaient pas choisi d’offre de marché, mais la CRE a rejeté cette proposition.
De plus, nous n’avons aucune indication sur le coût de ce montage complexe. Il a fallu rédiger un cahier des charges, recenser les entreprises n’ayant pas encore fait le choix d’un contrat de marché, déterminer un allotissement géographique et par type de sites de consommation, un plafonnement par nombre de consommateurs, de lots ou de volumes attribués, tout cela pour permettre la continuité de la fourniture, mais surtout pour imposer l’ouverture du marché, les opérateurs historiques étant contraints.
Dans ce dispositif, EDF est fortement handicapée, alors même qu’une autre distorsion aux règles de concurrence existe, mais ne fait l’objet d’aucune mesure particulière : ainsi, les nouveaux opérateurs n’appliquent pas le statut des industries électriques et gazières, les IEG, au mépris de la loi. Il s’agit là d’une concurrence déloyale, mais qui est tolérée.
Que dire encore de la précipitation avec laquelle nous devons ratifier cette ordonnance, sans avoir la possibilité de l’amender, puisque le montage est déjà réalisé et qu’il s’appliquera avant même le vote du présent texte ? À cet égard, tout cela ne fait que renforcer notre opposition au recours aux ordonnances.
De plus, cette ratification ne permettra plus la contestation devant le juge administratif, alors que les griefs qui pourraient être soulevés contre ce texte sont solides : atteinte à la liberté contractuelle, disproportion, rupture d’égalité. Au contraire, une fois ratifiée par le Parlement, l’ordonnance acquiert une valeur législative et ne peut être contestée que devant le juge constitutionnel.
Enfin, comme l’a très justement souligné M. le rapporteur, la pérennité des tarifs réglementés pour les particuliers est aujourd’hui loin d’être assurée, à moins d’une volonté politique forte, que nous n’avons pas constatée pour le moment.
Il existe donc un risque de voir à l’avenir ce mécanisme appliqué à une échelle beaucoup plus importante, sachant que les amendements proposés par les fournisseurs alternatifs au mois de janvier 2015 allaient beaucoup plus loin. Ces derniers voulaient par exemple avoir accès aux fichiers impayés des opérateurs historiques.
C’est pourquoi, madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, cela ne vous surprendra pas : nous voterons contre ce texte dont l’objectif est simplement, à nos yeux, d’accélérer la perte de part de marché des fournisseurs historiques en créant une concurrence artificielle au détriment des usagers et du service public.