Dans notre pays, certaines formations universitaires ont déjà tenté de s'émanciper des règles de gouvernance. Ainsi, les IUT, les écoles d'ingénieurs attachées à une université ou les instituts spécialisés ont réussi à obtenir certaines dérogations en matière de gouvernance. Relevons, par exemple, des droits d'inscription plus élevés, des instances dirigeantes quasi autonomes ou encore une sélection à l'entrée, comme celle qui est pratiquée à l'université de technologie de Compiègne ou à l'université Paris IX-Dauphine. Si le projet de loi ne saute le pas ni de la sélection, ni du droit d'inscription, il permet néanmoins des avancées importantes en donnant de nouvelles responsabilités aux universités, et tout d'abord en matière financière, avec l'établissement d'un budget global.
Ensuite, en matière de gestion des ressources humaines, les universités pourront recruter l'ensemble de leurs personnels, y compris le personnel administratif et les enseignants, avec la responsabilité de le faire au rythme de leurs besoins. Je me réjouis de cette avancée, car la gestion des personnels et le choix des candidats étaient soumis à une grande rigidité.
Enfin, les universités acquerront des responsabilités en matière de gestion de leur patrimoine, notamment immobilier. Concernant ce dernier point, je souhaite attirer votre attention sur l'état médiocre de nos établissements, qui sont même quelquefois hors normes de sécurité, et je souhaiterais entendre vos propositions, madame la ministre, puisque les conditions de travail à l'université seront l'un de vos prochains chantiers.
En obtenant la gestion de leur parc immobilier, nos universités vont gagner en souplesse, mais elles devront également réaliser un travail considérable, ce qui implique des risques financiers importants. Il faudra être particulièrement attentif aux difficultés des plus petites universités.
Je souhaite maintenant évoquer les ressources dont vont disposer nos universités.
L'enseignement supérieur et la recherche doivent être une priorité budgétaire de l'État. Les membres de mon groupe ont noté avec satisfaction l'engagement pris par le Président de la République d'augmenter le budget qui leur sera consacré de manière très importante, c'est-à-dire de 50 % sur cinq ans, soit cinq milliards d'euros.
Mais il serait illusoire de prétendre que le financement public peut permettre à lui seul de régler le problème du sous-financement des universités françaises.
Il est indispensable de diversifier les sources de financement pour augmenter significativement les moyens alloués à l'enseignement et de stimuler les financements privés sous toutes leurs formes. Par exemple, les universités françaises ne proposent pas, ou trop peu, de formations ou de cours payants en ligne, de locations de salles, de chaires d'entreprise.
Les donations sont particulièrement réduites par rapport à celles que l'on peut observer, notamment, aux États-Unis. Je me réjouis donc que ce projet de loi vise à développer le mécénat d'entreprise et à permettre aux universités de créer des fondations qui bénéficieront de conditions fiscales favorables.
J'évoquerai maintenant un autre point sur lequel j'aimerais vous entendre vous exprimer publiquement, madame la ministre.
À juste titre, vous avez déploré le recul de l'attractivité des universités françaises. Certes, nous accueillons encore de nombreux étudiants étrangers. Et il est normal que les étrangers boursiers du gouvernement français soient accueillis dans nos universités aux mêmes conditions que les étudiants français.
Mais l'enseignement supérieur, dans un monde globalisé, est devenu un marché concurrentiel. Des étudiants étrangers, auxquels nous ne sommes redevables en rien, pourraient trouver intérêt à venir étudier à leurs frais chez nous, si nous savons dispenser des enseignements reconnus internationalement et, aussi, les accueillir dans de bonnes conditions matérielles.
Dans certains pays ? je pense en particulier à l'Australie ?, l'accueil à titre onéreux d'étudiants étrangers est devenu un élément important de la balance commerciale. Sans aller jusque-là, nous devons avoir la volonté d'attirer et de former. Notre résolution d'améliorer notre rang dans le classement de Shanghai trouve là aussi sa raison d'être. Mais il est temps de le vouloir très fortement, car il s'agit d'un élément essentiel du rayonnement futur de la France, qui doit se convertir, pour nos universités aussi, en ardente obligation.
Comme vous l'avez souligné, madame la ministre, l'autonomie des universités est nécessaire mais pas suffisante. En lançant la concertation sur la réforme de l'enseignement supérieur, vous aviez résumé ainsi le problème : « L'autonomie, d'accord ! Mais pour quoi faire ? »
Le texte que nous allons adopter permettra de réformer en profondeur le système universitaire, autour des cinq chantiers que vous avez décrits. C'est avec confiance que nous vous apporterons notre soutien.
Nous serons particulièrement attentifs aux solutions qui pourront être envisagées pour remédier à l'échec constaté dans le premier cycle universitaire : en 2004, seulement 47 % des étudiants de première année sont passés en deuxième année, alors que 28 % redoublaient et que 24 % sortaient du système universitaire. Au total, seuls 59 % des étudiants français entreprenant des études universitaires les achèvent avec un diplôme, ce qui représente onze points de moins que la moyenne des pays de l'OCDE.
Il sera donc essentiel, comme vous l'avez expliqué, madame la ministre, de revoir totalement la question de l'orientation et de l'information. Pour corriger très en amont les mauvaises orientations, il est indispensable d'améliorer l'information des lycéens et des étudiants, de mieux définir les parcours de formation et d'insertion professionnelle et d'amplifier les échanges entre les acteurs du second degré et des universités.
Lors de l'examen du projet de loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école, j'avais d'ailleurs proposé au Sénat d'adopter un amendement au rapport annexé, qui visait à prévoir que « les universités et les établissements d'enseignement supérieur font connaître les acquis préalables qu'ils estiment nécessaires à la réussite des étudiants dans les filières dont ils ont la charge. Ces informations sont portées à la connaissance des lycéens. »
Hélas, le rapport annexé a été supprimé pour des raisons de procédure par le Conseil constitutionnel, et le problème demeure. Il nous faut maintenant le régler, dans l'intérêt des étudiants et de la nation.
Madame la ministre, votre projet de loi est nécessaire. Il marque le début de la reconstruction de notre enseignement supérieur. Le groupe de l'UMP, soyez-en sûre, vous accompagnera avec détermination dans cet indispensable effort.