Intervention de Jean-Michel Baylet

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 19 juillet 2016 à 17h35
Audition de M. Jean Michel baylet ministre de l'aménagement du territoire de la ruralité et des collectivités territoriales

Jean-Michel Baylet, ministre :

J'ai présenté une formule de péréquation qui n'a pas été acceptée. C'est toujours pareil : tout le monde réclame la péréquation à cor et à cris, sauf que personne ne la faisait. Nous l'avons faite via le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (Fpic), sauf qu'on n'entend pas les pauvres qui touchent, juste ceux qui contribuent ! Je l'ai vu dans ma commune... Il y aura donc de nouveau un fonds de soutien. Non seulement le reste à charge est trop important pour les départements, mais le fonds sera de 300 millions d'euros. Les 700 millions seront atteints d'une autre manière. Il faudra trouver une solution.

Monsieur Pellevat, nous prévoyons dans la loi montagne une dérogation pour les offices de tourisme uniquement pour les stations classées, et non pour ceux ayant une marque territoriale ; sinon ce serait comme abroger cet article de la loi NOTRe ! Je suis plutôt favorable au transfert de l'office de tourisme à l'intercommunalité. Je sais que Megève ou Courchevel ont des marques très puissantes. Le Premier ministre a accepté cette dérogation dans le cadre de la loi montagne. À la demande des élus de la montagne, il n'y a pas d'ordonnance sur les UTN. La rédaction commune conjugue des efforts d'aménagement du territoire et des verrous pour éviter certaines dérives, afin de développer les territoires.

Madame Bonnefoy, c'est parfait que vous ayez un PETR rural. Nous aiderons l'ingénierie, et je financerai sur les fonds de mon ministère une partie des contrats de ruralité. Sylvia Pinel avait mis en place la mission aidée permettant de faire de l'ingénierie territoriale dans les zones rurales. Je redonnerai des instructions aux préfets ; je veux un référent ruralité dans chaque département, c'est fait. Je veux qu'autour de lui se réunisse une commission, que certes je n'ai pas définie, mais qui réunit tous ceux concernés par les territoires. Je suis sidéré que les parlementaires soient parfois laissés de côté ! Je créerai les conditions pour que cela ne soit plus le cas.

Monsieur Rapin, je n'ai pas vos connaissances ni vos compétences sur le numerus clausus, mais notre décision est la bonne : nous le modulerons dans toutes les zones où il y a un déséquilibre et une nécessité de rouvrir les vannes. La décision est prise, annoncée par Marisol Touraine ; nous l'appliquerons.

Je partage totalement votre analyse de l'évolution des mentalités. Je suis en train de réaliser une maison de santé dans ma communauté de communes. Je négocie depuis des années avec les médecins. Il y a cinq ans, ma première démarche s'était soldée par un échec. Les médecins ne voulaient aucune contrainte ; j'ai refusé. Je n'ai pas voulu que des médecins d'autres communes viennent sur la maison centrale. Nous avons donc fait une maison de pôle. Les médecins sont en réseau, interactifs, assurant une permanence des soins jour et nuit, 365 jours par an. D'autres médecins sont restés dans des villages plus petits, aidés par la communauté de communes. La maison principale est à Valence d'Agen, et cela marche très bien. Les difficultés ne proviennent pas uniquement du numerus clausus, mais de la désertification, du refus de médecins de s'installer en milieu rural. Il y a aussi un état d'esprit des jeunes médecins qui a complètement changé. Autrefois, le médecin de campagne ou de famille était taillable et corvéable à merci. Il connaissait tout le monde, finissait parfois maire, conseiller général ou parlementaire. Aujourd'hui, les jeunes veulent bien s'installer dans certaines zones, parfois lointaines, mais ils veulent la garantie d'une vie « normale ». Ils ne veulent plus de la vie de leurs prédécesseurs.

On envisageait parfois, il y a une trentaine années, de nationaliser la médecine. Les médecins sont des ultralibéraux, même s'ils nous demandent des maisons de santé. Telle est la contradiction française. En haut, ils sont payés par la Sécurité sociale. En bas, il faut les installer dans des locaux appartenant aux collectivités. Au milieu, c'est un secteur totalement libéral refusant tout système coercitif.

Je vous propose de nous revoir sur la loi littoral. On n'entamera pas la réforme au tournant d'une audition parlementaire. Je connais bien la loi montagne comme ancien ministre du tourisme. Le littoral est lui aussi régi par des organisations votées il y a trente ans. On peut regarder à deux fois les dispositions pour créer les conditions d'un bon développement tout en respectant l'environnement et le patrimoine.

M. Roux, j'ai déjà répondu sur les ZRR : ce sont les intercommunalités. Je publierai bientôt cela. Globalement, cela reste à peu près pareil, mais il y a beaucoup de changements au sein des départements.

M. Chaize, oui, très peu de crédits ont été dépensés pour le plan France très haut débit. Ce n'est pas normal, d'autant que le commissaire à l'investissement Louis Schweitzer est prêt à y consacrer des sommes importantes dans le cadre des investissements d'avenir. Mais on a beaucoup de mal avec les opérateurs. Le plan très haut débit doit être validé par la Commission européenne, qui a notifié à la France des doutes sur la légalité de certaines aides à Orange sur son offre PRM (Points de raccordements mutualisés) de montée en débit sur le cuivre. Cela n'empêche pas un déblocage des fonds sur le terrain, sans doute avant la fin de l'été.

Quant aux mesures relatives à la téléphonie, tout est plus facile à dire qu'à faire ! Il y a des enjeux économiques considérables : des milliards d'euros. Ce n'est pas simple pour nous, politiques, d'autant que les multinationales indépendantes considèrent que nous n'avons pas notre mot à dire...

L'action publique sur le capital d'Orange est articulée autour de la concurrence pour les infrastructures. Il n'y a pas d'opérateur national en charge de la couverture numérique. Obtenir que les opérateurs soient sur le même pylône dans les zones les plus compliquées a été difficile. Le plus dur est Orange : comme il est le premier, ils n'a pas du tout envie de partager avec les autres ni d'être solidaire. Comme toujours, ceux qui ont le plus n'aiment pas trop partager... On en revient à la péréquation et au sens du partage. Nous faisons pression, je vous le garantis.

Certes, madame Herviaux, le centralisme aménageur et la Datar ont fait leur temps, leur méthodes aussi. J'ai connu l'époque de l'aménagement du littoral du Languedoc, à l'époque marécageux : on a pulvérisé du DDT, puis bétonné... Le préfet Racine régnait en maître sur le territoire. Ce type d'aménagement n'est plus de mise. C'est pourquoi j'ai souhaité que l'aménagement du territoire soit rattaché aux collectivités.

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