Je vous remercie de votre exposé, monsieur le ministre.
Je rejoins les propos de Jean-Pierre Sueur et Yannick Vaugrenard : rendre le service citoyen universel obligatoire pourrait redonner des repères à cette jeunesse qui n'est pas insérée ou qui ne veut pas s'insérer. Or vos propositions vont toucher la jeunesse qui est déjà intégrée, qui ne connaît peut-être pas beaucoup de choses, mais qui sait où se renseigner, où aller. Les jeunes qui nous intéressent sont ceux qui, lorsqu'ils rentrent - ou non - de l'école, n'ont pas de repères en dehors d'un quartier, d'un stade, de leurs deals, des jeunes qui sont en quelque sorte enfermés dans ce qu'ils considèrent comme leur « chez eux ». Ce sont parmi ces jeunes que se trouvent ceux qui peuvent commettre des actes comme à Nice ou en Allemagne, qui peuvent égorger un prêtre, attaquer à la hache.
Nous ne sommes pas à l'abri de tels actes individuels incontrôlés commis par des gens mal dans leur peau et qui se nourrissent de vidéos violentes.
Il est vrai qu'il y a des fractures numériques, mais quand on voit que des jeunes, avec portables et voitures, venant du Val-d'Oise, de l'Oise, de la Seine-et-Marne peuvent se rassembler en un quart d'heure, on voit qu'ils savent se servir du numérique. Comme le disait Yannick Vaugrenard, ils en font un usage complètement dévoyé. Ils regardent surtout des vidéos violentes de propagande ou jouent à des jeux tout aussi violents. Je vois souvent des gamins qui passent dix heures par jour sur écran à tuer, alors que leurs parents sont inexistants, travaillent, ou, pour calmer le gosse, le laissent faire : oui, il reste à la maison, mais à jouer à des jeux vidéo toute la journée !
Le service citoyen universel obligatoire toucherait tout le monde, y compris ces jeunes.
On aurait dû avoir une réflexion approfondie en amont avant d'attaquer le projet de loi, car nous avons beaucoup d'idées les uns et les autres pour améliorer les choses, chacun avec notre vision de ce monde de brutes. Nous avons plein de choses à dire, mais nous ne voulons pas non plus d'un dernier texte fourre-tout parce qu'il n'y a plus assez de temps.
Ce qu'ont dit mes collègues me satisfait entièrement. Pour qu'il puisse servir de point de repère, ce service citoyen doit concerner tout le monde : il ne doit pas y avoir de première classe et de deuxième classe, et il ne doit pas être fondé sur le volontariat. Je trouve que l'on est gentil, mais, à un moment donné, il faut peut-être être un peu plus dur et montrer qu'une société est régie comme ça et non pas comme chacun l'entend, même si l'on peut apporter des améliorations.
Pour les avoir pratiqués depuis des décennies, je peux vous assurer que les conseils de quartier, les conseils des jeunes, les conseils des sages enlèvent leur autorité au maire et aux conseillers municipaux, dévaluent leur travail, comme l'a dit Jean-Pierre Sueur. Nous sommes plusieurs à avoir eu le sentiment qu'il s'agissait de tirer à boulets rouges sur les élus : ceux qui y participent ont l'impression d'avoir un pouvoir et d'être plus compétents que les élus. Si l'on est élu, c'est pour assumer et, avec la multiplication de ces conseils, on s'y perd. Il faudrait peut-être trouver autre chose, faire en sorte par exemple qu'il y ait de nouveaux élus, des jeunes et des moins jeunes, par exemple, mais je ne suis pas sûre que multiplier sans fin les conseils soit une bonne chose.