Intervention de Rachel Mazuir

Réunion du 27 septembre 2016 à 21h30
Justice du xxie siècle — Article 18 quater

Photo de Rachel MazuirRachel Mazuir :

Je soutiens cet amendement et salue la démarche des députés, qui, enfin, rendent possible la modification de la mention de sexe à l’état civil. Il reste le problème de la preuve, évoqué, notamment, par M. le rapporteur.

Effectivement, on passe du dispositif suggéré par la Cour de cassation en 1992, à savoir un traitement chirurgical subi pour modifier une apparence, à un acte médical restreint attestant de ce changement. Cette avancée me paraît importante – le premier pas est toujours difficile à faire.

Le second pas, l’amendement de M. Jacques Mézard nous permet de le faire. Les personnes qui souhaitent changer la mention inscrite sur l’état civil méritent un peu de respect et de dignité. La disposition proposée y concourt ; je m’en félicite et, donc, soutiens cet amendement.

J’aurais toutefois souhaité que cette belle avancée ne s’arrête pas là et que l’on puisse enfin reconnaître officiellement la situation des personnes intersexuées. Il y a été fait allusion lorsque le terme « transgenre » a été employé.

J’ai le sentiment que cet article 18 quater ne traite que de la situation des personnes transsexuelles. Or parmi les personnes concernées par la question, se trouvent aussi les personnes intersexuées et, comme le souligne justement le rapport, ces deux états diffèrent fondamentalement.

En France, pour information, on estime que, chaque année, quelque 160 enfants naissent intersexués, c’est-à-dire avec une anomalie congénitale entraînant une difficulté de détermination de sexe.

Comme l’état civil actuel ne reconnaît que le masculin et le féminin, les parents doivent faire subir des interventions chirurgicales très – voire trop – nombreuses à leur enfant, et ce jusqu’à l’adolescence. Évidemment, ces actes sont condamnés, non seulement par les associations et leurs avocats, que j’ai reçus, mais aussi par la Cour européenne des droits de l’homme, qui les juge illégaux.

En outre, lorsque l’anomalie est détectée in utero – chez les femmes, bien sûr, qui ont les moyens de payer les examens nécessaires –, celles-ci se font systématiquement avorter.

Une lueur d’espoir est apparue, voilà peu. Le 20 août 2015, le tribunal de grande instance de Tours a ordonné au service de l’état civil de corriger l’acte de naissance d’une personne intersexuée, afin d’y apposer la mention de « sexe neutre ». La cour d’appel, évidemment, n’a pas suivi cette décision, pour une simple question de forme : la loi ne le permet pas !

J’avais donc demandé qu’un certain nombre d’amendements puissent permettre de prendre en compte cette dimension dans le cadre de ce projet de loi de modernisation de la justice du XXIe siècle. Cela n’a pas été le cas et, la délégation aux droits des femmes s’étant, je crois, saisie du dossier, nous recevrons un rapport sur la question.

De nombreux pays, je le rappelle, ont évolué dans ce sens et je souhaite voir cette démarche aboutir, au bénéfice de ces personnes intersexuées, qui vivent des moments très difficiles.

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