Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la question que nous devons nous poser, avant d’entamer l’examen de cet article, est simple : l’objectif de 25 % en 2025 est-il tenable pour les communes qui sont soumises à l’article 55 de la loi SRU ?
Mon cher collègue Favier, essayons de sortir de la caricature. Il est parfois un peu compliqué de démontrer quelque chose ; en revanche, pour démontrer le contraire d’une affirmation, un contre-exemple suffit. Alors, permettez-moi de vous en citer un, celui de ma commune.
Voilà quinze ans, elle comptait 5 % de logements sociaux ; aujourd’hui, nous en sommes à 15 %. J’ai toujours respecté les objectifs triennaux et je respecterai le dernier, qui s’achève en 2016, avec 300 logements sociaux mis en construction.
La population de ma commune a crû de 30 % en vingt ans. Vous rendez-vous compte de ce que cela signifie, s’agissant d’un territoire situé au milieu de la Seine-Saint-Denis et à dix kilomètres de Paris ?
Nous avons utilisé tous les moyens à notre disposition, construit, racheté des bâtiments anciens pour les confier à des bailleurs sociaux. Mais, à ce jour, atteindre 25 % de logements sociaux en 2025, ce n’est pas possible ! Pour une raison simple : si je veux préserver la mixité sociale au milieu de la Seine-Saint-Denis et si je veux faire 50 % de social et 50 % de logements en accession à la propriété, je dois construire 2 400 logements d’ici à 2025, c'est-à-dire en neuf ans, monsieur Favier. Or, je vous le dis, c’est impossible !
Si l’exemple de ma commune n’est pas suffisant, je vous renvoie au rapport du CGEDD. Madame la ministre, lors de la discussion générale, vous m’avez dit que j’en faisais une interprétation un peu particulière. Puisque je l’ai sous les yeux, nous allons pouvoir en discuter. Au sujet des communes qui entrent dans le dispositif – mais cette observation vaut pour toutes les communes, parce que ce qui importe, ce n’est pas de savoir si telle commune est soumise depuis peu ou depuis plus longtemps à l’article 55 de la loi SRU ; la question qui se pose est celle du taux, du délai et des objectifs à atteindre –, voici ce qu’écrit le CGEDD : « Les perspectives d’évolution s’inscrivent dans un contexte de contraintes qui vont aller en s’accroissant. Le prochain ″triennal″ verra très vraisemblablement, à législation inchangée, un accroissement sensible du nombre de communes carencées. Cette augmentation est la conséquence logique de l’augmentation exponentielle des taux prévus par la loi : rattraper 25 % du retard en 2016, 33 % en 2019, 50 % en 2022, pour avoir rattrapé 100 % du retard en 2025. Le niveau d’objectif est très exigeant et s’applique à des situations communales contrastées. »
En conclusion, le CGEDD recommande à l’État – et c’est un peu fort de café – de renforcer ses services, parce que les services décentralisés de l’État seront incapables de faire face à la hausse du nombre de communes carencées en 2016, en 2019 et par la suite.
Voilà, mes chers collègues, les termes dans lesquels il faudrait poser ce problème pour sortir de la caricature. C’est la raison pour laquelle je remercie notre rapporteur d’avoir choisi la solution du contrat d’objectifs entre l’État et les collectivités locales. C’est une idée que je soutenais depuis longtemps, elle se trouve traduite ici dans la réalité. Dans la suite de l’examen de cet article 29, vous verrez que celui-ci n’a pas pour objet d’exonérer tout le monde des prescriptions de la loi SRU. J’en ai assez qu’on ne parle de ce sujet qu’à cause des quelques maires – ils ne sont pas si nombreux – qui répètent haut et fort qu’ils ne veulent rien faire. À continuer comme vous le faites, vous dégoûterez ceux qui ont fait et qui veulent faire de continuer à faire !