Je voudrais d’abord exprimer ma solidarité toute particulière à l’égard des policiers après le tragique drame survenu récemment.
Ces trois amendements font suite à une proposition de loi présentée par Éliane Assassi que la commission des lois avait rejetée. Le Sénat avait commencé l’examen de ce texte le 18 mai dernier, mais sans le poursuivre jusqu’à son terme, le temps imparti au groupe CRC ayant été épuisé. Néanmoins, le Sénat avait rejeté l’article 1er, qui constituait l’essentiel de ce texte.
L’objet de ces amendements est donc de modifier le code de procédure pénale pour mieux lutter contre les contrôles d’identité abusifs ou discriminatoires et d’instaurer le récépissé en cas de contrôle d’identité. La notion de « raisons plausibles de soupçonner », qu’il est proposé de remplacer par celle de « raisons objectives et individualisées » dans l’amendement n° 340 rectifié bis, est parfaitement connue des services de police. À titre d’exemple, l’article 62-2 du code précité y fait explicitement référence s’agissant du placement en garde à vue.
Le ministre de l’intérieur l’a indiqué à l’Assemblée nationale, « le recours à une telle mesure doit nécessairement reposer sur des raisons objectives, individualisées et précisément circonstanciées. Les raisons plausibles de soupçonner doivent reposer sur des faits concrets, des comportements, en aucun cas sur l’apparence physique ou sur l’origine : ce serait contraire à tous les principes du droit », donc à notre ordre constitutionnel.
Je veux souligner que, pour valider ces contrôles d’identité, les juridictions exigent des éléments objectifs déduits de circonstances extérieures à la personne même de l’intéressé, comme le rappellent en permanence les juges lorsqu’ils ont à connaître des conditions dans lesquelles sont appliquées ces mesures.
Je précise que, dans une décision du 17 août 2011, la Cour de cassation a décidé qu’il n’y avait pas lieu de renvoyer une question prioritaire de constitutionnalité devant le Conseil constitutionnel, considérant que la rédaction du premier alinéa de l’article 78-2 du code de procédure pénale, notamment les termes « une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner », n’était pas contraire à l’objectif d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi, au droit de la liberté d’aller et venir, au droit au recours effectif et au principe d’égalité devant la loi.
S’agissant de la mise en place du récépissé de contrôle d’identité et de fouille, je rappelle que cette proposition a été rejetée à l’issue d’un large débat à l’Assemblée nationale. Il s’agit sinon d’une promesse, en tout cas d’une idée qui avait été mise en avant au cours de la campagne présidentielle de 2012 et qui a, en définitive, été abandonnée. Il ne nous appartient pas dans cette enceinte de porter un jugement sur des promesses ou des idées de campagne, quelles que soient les campagnes.
Toutefois, ce dispositif ne permettrait pas d’atteindre les objectifs que poursuivent les auteurs de ces amendements. Faisons preuve de bon sens : si un récépissé est donné à une personne contrôlée, celle-ci peut très bien être interpellée, au sens premier du terme, quelque temps après. Elle devra montrer son récépissé. On n’empêchera pas les contrôles.
Par ailleurs, l’établissement du récépissé pour prouver, le cas échéant, l’existence de contrôles abusifs nécessiterait la création d’un fichier des personnes contrôlées.