Intervention de Emmanuelle Cosse

Réunion du 12 octobre 2016 à 14h30
Égalité et citoyenneté — Article 32 ter précédemment réservé

Emmanuelle Cosse, ministre :

Cet amendement, qui porte sur un article dont la discussion avait été réservée jusqu’à la fin du titre II, a pour objet la transformation de la Société de valorisation foncière et immobilière, la SOVAFIM, en une société foncière solidaire ayant vocation à intervenir afin d’alléger le coût du foncier pour accélérer la construction de logements, en majorité sociaux.

Beaucoup de questions ont été posées, notamment en commission spéciale, où vous avez pu entendre Thierry Repentin, qui a été chargé d’une mission sur cette question. Vous nous avez en particulier interrogés sur la rapidité avec laquelle nous avons inséré cette disposition dans ce texte de loi.

Permettez-moi de rappeler le contexte dans lequel cette proposition a été élaborée. Lors du bicentenaire de la Caisse des dépôts et consignations, le Président de la République, à la suite d’une concertation avec de très nombreux acteurs du logement, s’est engagé à créer une société foncière solidaire pour accélérer la construction de logements. Une mission a été confiée à Thierry Repentin pour étudier la faisabilité d’un tel projet. Celui-ci a remis son rapport au début du mois de septembre et nous avons décidé, à l’issue des arbitrages qui ont été rendus, d’utiliser une société actuellement existante, la SOVAFIM, pour nous doter au niveau national d’une société foncière solidaire.

Face aux inquiétudes qui ont pu voir le jour, je voudrais préciser quelques éléments. Il ne s’agit pas de créer une nouvelle société destinée à se substituer aux outils qui fonctionnent déjà, à savoir les établissements publics fonciers, les EPF, qu’ils soient d’État ou locaux. Ceux-ci couvrent une grande partie du territoire et, en fonction des décisions qui ont été prises dans leur programmation pluriannuelle, agissent pour porter du foncier, faire de la veille et de la stratégie foncière, construire des logements, sociaux ou privés. Ils agissent également sur l’activité économique, notamment en procédant au rachat partiel de friches industrielles, et travaillent par ailleurs dans des territoires très particuliers, notamment sur du portage foncier agricole en lien avec les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural, les SAFER.

La société foncière que nous vous proposons de créer agirait uniquement sur la création de logements sur les terrains publics, en lien avec la loi de 2013 relative à la mobilisation du foncier public.

Il ne s’agit donc en aucun cas de remplacer les établissements publics fonciers actuels, même si certains d’entre eux, qu’ils soient d’État ou locaux, sont d’ores et déjà intéressés par l’idée que, après une période de portage de quelques années, le plus souvent cinq ans, la société foncière puisse les suppléer dans des cas extrêmement difficiles. En effet, les portages fonciers s’avèrent parfois extrêmement complexes.

Toutefois, l’objet principal de la société foncière solidaire sera de stimuler la construction de logements sur du foncier public, notamment dans des zones très tendues.

En termes de moyens financiers, cette société sera dotée d’un capital de 750 millions d’euros, à parité entre l’État et la Caisse des dépôts et consignations, pour lui permettre, par la voie de l’emprunt, d’avoir une capacité d’investissement de 2 milliards d’euros.

À titre de comparaison, les établissements publics fonciers d’État disposent aujourd’hui, chaque année, de 500 millions d’euros de recettes, ce qui leur permet de réaliser annuellement 700 millions d’euros d’acquisitions et 300 millions d’euros de cessions, ainsi que de détenir un stock foncier équivalant à 3 milliards d’euros. Il s’agit donc d’opérations très différentes.

Aujourd’hui, les établissements publics fonciers représentent l’outil massif de portage foncier dans les territoires, mais il serait intéressant d’avoir une société foncière nationale pour agir sur la production de logements, qu’ils soient sociaux, intermédiaires ou privés.

La SOVAFIM disposant aujourd’hui de prérogatives et de dispositifs fiscaux concernant les terrains privés, il s’agirait de transmettre à cette nouvelle société les moyens actuels de la SOVAFIM, d’accélérer de fait la cession des terrains publics de l’État et, évidemment, de faire baisser consécutivement les coûts d’aménagement de ces terrains, notamment dans les zones extrêmement tendues.

Je voudrais préciser enfin que cette proposition s’inscrit dans la suite logique de plusieurs rapports d’information rédigés sur le sujet, notamment le rapport d’information sénatorial de Dominique Braye et de Thierry Repentin, de 2005, qui avait d’ores et déjà souligné la nécessité de créer un tel outil, ou encore celui rédigé, à l’Assemblée nationale, par Audrey Linkenheld et Jean-Marie Tétart sur la mise en application de la loi de 2013, et qui avait également insisté sur ce besoin. Le rapport d’information de Daniel Goldberg de février 2016 a aussi proposé un certain nombre d’outils pour faciliter la mobilisation du foncier privé en faveur du logement, de même que le rapport de Dominique Figeat, commandé par le Gouvernement.

Je comprends parfaitement vos interrogations, qui ont justifié un débat nourri en commission spéciale et des demandes d’information formulées la semaine dernière par le président Jean-Claude Lenoir, auxquelles j’espère avoir répondu. Nous avons en effet voulu aller extrêmement vite et défendre la création de cette société dans ce texte de loi, à côté d’autres dispositions relatives aux questions foncières.

Plus généralement, aujourd’hui, notre objectif est de donner aux territoires des outils fonciers répondant à leurs besoins. Nous sommes en discussion avec certains territoires pour étendre des établissements publics fonciers d’État. Nous avons aussi engagé un dialogue avec les établissements publics fonciers locaux pour les aider à asseoir leur activité, notamment dans des territoires où ils sont présents, pour certains, depuis quarante ans. Nous essayons donc de donner à l’ensemble des territoires des moyens d’agir plus rapidement sur le logement, et cette société foncière solidaire sera un outil supplémentaire qui viendra en complément des outils existants, et qui pourra véritablement nous permettre de changer la donne, notamment dans les zones très tendues où, sans ces outils de portage assez forts, nous n’arriverons pas à produire des logements à des coûts maîtrisés.

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