Je voudrais essayer de répondre à plusieurs des interrogations qui ont été soulevées. Cet amendement n’a en effet été déposé que le 3 octobre. Lorsque Thierry Repentin est venu exposer le projet devant la commission spéciale, il venait de rendre son rapport et ne pouvait donc pas vous présenter une rédaction précise, qui demandait, vous le comprendrez aisément, un peu de temps. Nous devions aussi nous assurer de la fiabilité juridique du dispositif.
La question de la création d’une société foncière solidaire n’est pas nouvelle : on en parle depuis plus de quinze ans ! Certains d’entre vous ont évoqué une certaine précipitation. Ce n’est pas le cas. Nous sommes simplement dans l’action ! Je connais bien ce sujet et je crois absolument nécessaire, d’une part, de consolider les établissements publics fonciers, qu’ils soient d’État ou locaux, d’autre part, de disposer d’un outil national pour la production de logements dans certaines situations.
Contrairement à ce que j’ai pu entendre, un établissement public foncier, quand il existe, ne peut pas, malheureusement, s’occuper de tous les terrains : certains sont par exemple trop pollués, donc trop chers, si bien que les opérations sont trop complexes.
Aujourd’hui, certains établissements publics fonciers locaux sont obligés, au bout de cinq ans, de revendre des terrains ou de les faire reprendre par les communes, parce que le portage n’a pas pu aller à son terme. Et, parfois, certains terrains ne trouvent pas d’acquéreur.
La société foncière que nous proposons ne sera pas le bras armé de l’État ; elle vise à aider les territoires à monter des projets sur les terrains publics qui sont cédés dans le cadre de la loi de 2013.
À titre d’exemple, nous avons fixé un objectif de cent cessions pour l’année – nous en sommes à plus de soixante aujourd’hui –, mais il arrive que, même pour les terrains que l’État est prêt à céder au prix le plus bas et même lorsqu’il y a des besoins, les collectivités n’aient pas de projet ou ne disposent pas des moyens suffisants pour en réaliser un à elles seules.
C’est pourquoi nous voulons ajouter un outil supplémentaire. Nous ne souhaitons, en aucun cas, mettre en cause l’action actuelle des établissements publics fonciers. D’ailleurs, les chiffres sont très éloignés : les établissements publics fonciers de l’État mobilisent 500 millions d’euros de recettes par an, tandis que la société foncière solidaire disposera d’un capital de 750 millions d’euros, sans possibilité de l’augmenter par la suite.
Le sénateur Dubois a posé la question de la valeur ajoutée de cette société. Il s’agit de construire, dans les plus brefs délais, sur du foncier public. Cela constituera le seul objectif de la société, qui pourra, pour cela, lever rapidement les emprunts nécessaires.
Comme plusieurs d’entre vous l’ont souligné, cette proposition est soutenue par de nombreux acteurs du logement, qu’ils appartiennent à la sphère sociale ou à celle de la promotion immobilière, comme la Fédération française du bâtiment ou la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment, la CAPEB.
C’est pour donner de nouveaux moyens aux territoires que j’ai souhaité aller vite et en débattre devant vous à l’occasion de l’examen de ce projet de loi.
Je comprends que certaines questions peuvent se poser, par exemple sur le statut fiscal ou les outils mis à la disposition de la société foncière. Certaines réponses seront d’ailleurs apportées, de manière plus appropriée, dans le cadre du projet de loi de finances, mais je peux vous dire dès aujourd’hui que certaines prérogatives exorbitantes du droit commun sont déjà à la disposition de la SOVAFIM.
Je rappelle que cette société, créée pour s’occuper de la cession et de l’utilisation de certains terrains, comme ceux de Réseau ferré de France, a été dotée d’un régime exorbitant du droit commun, par exemple en matière de droit de préemption ou d’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties.
La Cour des comptes a montré que la SOVAFIM, qui n’a pas été en mesure de faire le travail qui était attendu d’elle, ne répond plus, aujourd’hui, aux objectifs qui lui ont été fixés.
Lors de la célébration du bicentenaire de la Caisse des dépôts et consignations, le Président de la République a pris l’engagement de créer une société foncière solidaire. C’est un projet qui est fortement soutenu par de nombreux acteurs, comme par les partis politiques de notre pays, mais il est d’abord attendu par les territoires, qui ont besoin de cet outil supplémentaire.
Je peux comprendre que vous soyez froissés par un sentiment de précipitation, mais nous sommes en train d’examiner un projet de loi qui traite justement de la question du logement et il me semble important de présenter maintenant cette proposition.
Je souhaite d’ailleurs remercier la commission spéciale, qui nous a soutenus en émettant un avis favorable sur cet amendement. Donnez-nous simplement la chance de créer cet outil !
Je rappelle qu’aujourd’hui, l’État cède d’ores et déjà des terrains, non pas dans un objectif de rendement financier, mais pour accélérer la construction de logements. La création de la société foncière solidaire ne constitue donc pas un manque à gagner pour lui. D’ailleurs, on estime même généralement que l’insuffisance de logements coûte en fait beaucoup à l’État.
Notre objectif est de disposer d’un outil opérationnel au service des territoires, afin d’agir vite et de produire, en cinq ans, plusieurs milliers de logements, en plus de ce qui est réalisé par les établissements publics fonciers.
Il faut savoir qu’un certain nombre de ces établissements publics fonciers ne s’occupent finalement pas de logement, car ils n’ont pas été créés pour cela. Ainsi, ils sont parfois mobilisés pour la dépollution de grandes friches industrielles ou pour la reprise d’activités économiques. Chaque établissement a ses propres programmations pluriannuelles.
C’est pour l’ensemble de ces raisons que je souhaite défendre jusqu’au bout cet amendement, qui est utile pour les territoires, la politique du logement et celle de l’aménagement foncier. J’espère que vous en serez convaincus !