Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’essentiel de la proposition de loi est contenu dans cet article. Si je comprends et approuve les objectifs des auteurs de ce texte, je m’interroge sur la portée réelle de ces dispositions.
En effet, la vérification de la réalisation de la formalité administrative liée à ce devoir de vigilance dans le rapport et les documents d’information de certaines entreprises est à la portée de notre administration. En revanche, l’effectivité des mesures de vigilance et des contrôles sur les échanges internationaux, qui reposent souvent sur des chaînes d’approvisionnement en cascade, est plus qu’aléatoire, voire impossible à assurer dans de nombreux cas.
Nous ne devons pas adopter des lois uniquement pour nous donner bonne conscience : il faut s’assurer de leur caractère opérationnel sur le terrain. Le dispositif proposé, tant dans sa version issue des travaux de l’Assemblée nationale que dans celle du Sénat, a davantage une valeur incitative et pédagogique qu’une dimension opérationnelle.
Sur cette base, il ne me paraît pas utile de surtransposer par anticipation une directive européenne qui aurait pour seul effet concret de créer des contraintes administratives supplémentaires au moment où notre économie est en attente de simplification.
Pour la protection des droits humains, la défense de l’environnement et la lutte contre la corruption, nous devons agir d’abord au niveau des États, sur les législations et les réglementations qu’ils appliquent. C’est là que nous devons accentuer notre pression.
Mais il est vrai que l’on demande souvent davantage d’éthique aux entreprises, qu’elles soient nationales ou internationales, qu’aux États, y compris le nôtre, d’ailleurs. En effet, on pourrait s’interroger sur nos relations et partenariats commerciaux avec des pays qui n’appliquent pas un certain nombre de droits dont nous voulons nous assurer qu’ils sont bien respectés dans les échanges de l’économie privée.
Je citerai le Qatar ou l’Arabie Saoudite, qui ont déjà été mentionnés par l’un de mes collègues. Nous concluons des accords ou des conventions fiscales parmi les plus avantageuses au monde, avec le Qatar et le Koweït par exemple, sans nous poser trop de questions sur l’éthique, notamment en matière de droits de l’homme, de ces pays.
Avant de vouloir donner des leçons à la terre entière, il faut parfois savoir balayer devant sa porte !