Intervention de Patrick Abate

Réunion du 18 octobre 2016 à 22h30
Orientation scolaire — Débat sur les conclusions d'une mission d'information de la commission de la culture

Photo de Patrick AbatePatrick Abate :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à saluer le travail particulièrement sérieux et, je crois, sincèrement engagé de Guy-Dominique Kennel ; de toute évidence, notre collègue enrichit un débat qui est, de l’avis général, fondamental.

De puissants déterminismes et stéréotypes sont à l’œuvre dans l’orientation scolaire. D’ailleurs, celle-ci est souvent trop réduite à une procédure de tri social des élèves via les trois voies de formation du lycée. Monsieur le rapporteur, ce constat a été bien identifié par la mission d’information, et vous l’avez évoqué avec clairvoyance.

Cependant, malgré l’intérêt de certaines d’entre elles, l’essentiel de vos recommandations visent davantage, selon moi, à réguler les flux d’élèves qu’à s’attaquer à l’origine de l’échec : le poids des déterminismes qui placent nombre d’élèves en difficulté, bien souvent dès le primaire.

Depuis 2005, les politiques publiques, telles qu’orientées par la stratégie de Lisbonne, tendent à promouvoir une conception de l’éducation tournée principalement vers un objectif d’employabilité, s’appuyant sur les difficultés objectives de notre système. Ainsi, malgré les précautions oratoires que vous avez prises dans votre exposé, monsieur Kennel, votre rapport d’information fait de l’insertion professionnelle non pas l’un des objectifs du système éducatif, mais un objectif au cœur de ce système ; c’est en tout cas ce que nous ressentons.

De fait, vous proposez des outils destinés surtout à gérer et à calibrer les flux d’élèves, comme une sélection à l’entrée à l’université, selon des prérequis, pour les formations à effectifs limités ; nous en débattrons la semaine prochaine lorsque nous traiterons de la réforme des masters.

Vous avancez aussi l’idée d’une carte des formations plus « réactive » aux besoins locaux et en plus forte adéquation avec les entreprises. Très bien, mais je ne suis pas sûr que ce soit la préoccupation la plus importante à prendre en compte, d’autant que les entreprises sont bien souvent dans l’incapacité d’anticiper leurs besoins à une échéance en rapport avec le temps nécessaire pour former un jeune. Sans compter que, comme l’on sait, un tiers des emplois qui existeront dans dix ans ne sont même pas connus aujourd’hui. (

Certes, l’insertion professionnelle est une question fondamentale posée au système éducatif ; mais ce n’est pas le seul défi que celui-ci doit relever. La complexification des savoirs, du travail et de l’organisation de celui-ci implique une élévation du niveau des connaissances, pour permettre à tous les élèves d’être en mesure de s’adapter. Ne pas le prendre en compte, c’est accepter que certains élèves, les moins en connivence avec l’institution scolaire, demeurent cantonnés à une orientation par l’échec, tandis que d’autres seraient destinés, a priori, à la poursuite d’études : ceux que certains nomment « les plus méritants ». Quid, alors, madame la ministre, du « tous capables » inscrit dans la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République ?

C’est pourquoi mon groupe s’interroge et interroge sur le principe d’un allongement de la scolarité obligatoire à dix-huit ans, …

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