Intervention de Patrick Abate

Réunion du 18 octobre 2016 à 22h30
Orientation scolaire — Débat sur les conclusions d'une mission d'information de la commission de la culture

Photo de Patrick AbatePatrick Abate :

… avec une orientation plus tardive, afin de penser et d’agir au sein de l’école pour offrir la remédiation nécessaire aux élèves qui en ont le plus besoin.

La mission d’information préconise de confier le pilotage de l’orientation scolaire à la région via la régionalisation des CIO, en contradiction avec la loi du 5 mars 2014, qui a réaffirmé le rôle de l’État en la matière. Que deviendrait, dès lors, le principe fondamental qui sous-tend le service public de l’éducation nationale : une réponse égalitaire dans le droit et l’accès à l’éducation sur tout le territoire ? De fait, on ne peut ignorer le risque d’un creusement des inégalités, alors que les collectivités territoriales voient leurs moyens réduits et que la répartition des richesses sur le territoire n’est – c’est le moins que l’on puisse dire – pas tout à fait égale.

Par ailleurs, le rapport d’information minore, à mon sens, l’importance des processus psychologiques et sociaux dans l’orientation. En effet, l’élaboration d’un projet d’avenir chez un adolescent ne se résume pas à une simple question d’information sur la réalité des métiers et sur les formations offertes. Ce projet doit aussi être en lien étroit avec le développement de la personnalité du jeune et la construction de son identité – je n’ai pas dit un gros mot. S’agissant d’élèves du secondaire, singulièrement de collégiens et de collégiennes, qui commencent leur construction d’adulte et de citoyen, la question devrait être posée davantage en termes de développement individuel, de reconnaissance, d’estimation de soi et d’émancipation.

Parce que cette approche implique que les élèves bénéficient de l’accompagnement d’une pluralité de professionnels, nous refusons la mise en berne du corps actuel des conseillers d’orientation-psychologues ; il faut certes qu’ils travaillent en collaboration avec les enseignants, mais ceux-ci ne sont pas formés pour assurer les missions de ceux-là. Du reste, je m’interroge vraiment sur l’utilité, en tout cas sur l’efficacité, d’un stage obligatoire en entreprise censé permettre aux enseignants de maîtriser les enjeux du monde du travail.

Pour ce qui nous concerne, nous soutenons la démarche engagée au niveau du ministère pour créer un corps unique de psychologues de la maternelle à l’enseignement supérieur. Nous considérons, madame la ministre, qu’elle devra s’accompagner de recrutements, pour que cesse la situation inacceptable de conseillers d’orientation-psychologues responsables de 1 400 à 1 600 élèves sur deux ou trois établissements.

Enfin, la réforme du bac professionnel en trois ans, dont les écueils sont pourtant reconnus, n’est pas réinterrogée dans le rapport d’information, ce qui est dommage. Il est proposé de favoriser la mixité des publics et des parcours : très bien, mais son efficacité sur la réussite des élèves n’est pas questionnée, non plus que ne sont prises en compte les difficultés pédagogiques et organisationnelles qu’elle entraîne.

Au total, monsieur Kennel, même si votre rapport d’information est intéressant, je ne partage pas l’essentiel de ses conclusions. Certaines des propositions qu’il comprend ont déjà été portées sous le précédent quinquennat et, à notre sens, il ne soulève pas suffisamment le problème des moyens, tant humains que financiers.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion