Intervention de Agnès Canayer

Réunion du 18 octobre 2016 à 22h30
Orientation scolaire — Débat sur les conclusions d'une mission d'information de la commission de la culture

Photo de Agnès CanayerAgnès Canayer :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission et chère Catherine, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous sommes aujourd’hui invités à débattre de l’avenir professionnel de nos enfants et plus précisément de leur orientation scolaire. L’enjeu est de taille !

L’excellent rapport de notre collègue Guy-Dominique Kennel apporte un éclairage nouveau sur le sujet.

La France est le cinquième pays le plus riche du monde mais connaît un échec scolaire massif, puisque près de 20 % des jeunes sortent chaque année du système éducatif sans qualification. Chaque année, on comptabilise donc 140 000 jeunes « décrocheurs ». En parallèle, les métiers évoluent. Nous sommes donc face un vrai défi : insérer des jeunes dans une société en pleine mutation.

Or nous connaissons tous des exemples concrets d’orientations ratées. C’est le cas des huit jeunes issus du Bois de Bléville, au Havre, quartier politique de la ville, que j’ai rencontrés dernièrement et qui ont tous décroché en raison de leur orientation contre leur souhait en comptabilité. Ces nombreuses situations justifient notre débat de ce soir et impliquent une vraie réflexion sur la réforme de l’orientation des jeunes.

Toutefois, on ne peut pas aborder la question de l’orientation scolaire sans appréhender celle de l’insertion professionnelle des jeunes.

Ainsi, il apparaît essentiel de renforcer les liens entre les acteurs du monde éducatif et ceux de l’emploi. En effet, l’école doit préparer l’insertion professionnelle des jeunes. Le décloisonnement entre corps professoral, milieu entrepreneurial et acteurs de l’emploi est une urgente nécessité. De manière assez évidente, il est fondamental de permettre à chaque jeune de découvrir le monde de l’entreprise et les métiers, pour qu’il puisse choisir la voie qui lui correspond. En effet, de trop nombreux jeunes sont orientés par défaut dans des filières non choisies, ce qui entraîne inévitablement leur décrochage.

L’orientation doit être positive et être élaborée avec le jeune et sa famille. Ainsi, au cours de sa scolarité, un véritable parcours d’orientation doit être proposé à chaque jeune. Il doit lui permettre d’identifier ses appétences et ses capacités, lui faire découvrir les métiers, l’accompagner dans ses choix de formation et l’éclairer sur les embûches du parcours choisi. Cette opportunité doit être offerte à tous les élèves, quel que soit leur environnement social. Le parcours de l’élève se déclinerait en tests de compétences, bilans d’orientation, stages de découverte en entreprise et rencontres avec les professionnels. L’entreprise crée l’emploi et l’école forme le salarié de demain.

Les formations proposées aux jeunes doivent en outre être en adéquation avec les besoins prévisionnels des territoires économiques. Par exemple, l'Union des industries et des métiers de la métallurgie, l'UIMM, a développé en Seine-Maritime des centres de formation qui préparent aux métiers dont ont besoin les entreprises du secteur. Les jeunes orientés en apprentissage vers le pôle de formation de l’industrie acquièrent un savoir-faire d’excellence et développent les compétences nécessaires pour leur future embauche. Dernièrement, l'UIMM est allée plus loin encore en créant une seconde dite « structurante ». Celle-ci accueille des jeunes « décrocheurs » pour leur redonner les bases scolaires nécessaires, les compétences professionnelles qui leur seront utiles et surtout la confiance en eux, indispensable à leur réussite.

L’orientation professionnelle se fait donc en contact direct avec le monde du travail. Elle satisfait un besoin local de main-d’œuvre et offre des opportunités de réussite pour les jeunes. Malheureusement, faute d’orientation positive, trop de jeunes restent actuellement au bord du chemin de l’insertion professionnelle, nous obligeant à déployer des moyens considérables pour leur remobilisation vers l’emploi, comme la garantie jeunes aujourd’hui pilotée par les missions locales. Ces situations d’extrême fragilité pourraient être limitées si les relations entre les établissements scolaires et les missions locales étaient plus étroites, ce qui permettrait d’élaborer les projets professionnels des « pré-décrocheurs ». La prévention du « décrochage » doit prendre le dessus sur des actions plus curatives.

Enfin, la politique en matière de formation et d’orientation doit être déclinée à l’échelle des régions, lesquelles doivent pouvoir coordonner leurs plans de formation avec les perspectives locales en matière d’emploi. Elles doivent également développer une vision stratégique pour renforcer l’attractivité et la vitalité de leurs territoires et adapter constamment l’offre de formation aux évolutions des métiers. C’est en créant des mécanismes d’orientation et de formation fondés sur la souplesse, la connaissance réciproque et l’adaptation aux besoins que nous pourrons relever les défis de l’orientation positive, l’orientation réussie !

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