Intervention de Albéric de Montgolfier

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 19 octobre 2016 à 8h33
Projet d'instauration du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu — Audition de M. Bruno Parent directeur général des finances publiques dgfip

Photo de Albéric de MontgolfierAlbéric de Montgolfier, rapporteur général :

Le sujet est complexe et intéressant. Nous avons ouvert un espace participatif sur le projet de de prélèvement à la source, qui a reçu 1 142 contributions à ce stade.

Je rends un hommage sincère à la DGFiP. La France a développé des outils informatiques assez remarquables : la déclaration préremplie, la mensualisation, les prélèvements à l'échéance, le portail www.impots.gouv.fr, avec l'espace « Particuliers », sur lequel on a accès à l'ensemble des avis d'imposition, y compris à l'historique. Notre administration fiscale a donc peut-être compensé l'absence de prélèvement à la source par des outils qui rendent le système plus fluide.

Pourquoi a-t-on écarté deux autres scénarios, qui consistaient à remettre l'administration fiscale - le Parlement avait d'ailleurs amendé le projet de loi de finances pour 2016 en vue d'étudier cette alternative - au centre du dispositif ?

Je me réfère aux préconisations du Conseil des prélèvements obligatoires - j'en parlais ce matin avec son président, Didier Migaud - pour rendre l'imposition contemporaine. Nous sommes d'accord : il est tout de même aberrant de payer un impôt sur la base des revenus de l'année N-1. Mais pourquoi avoir introduit les entreprises comme collecteurs tiers ? Cela va compliquer le système. Nous l'avons vu lorsque nous avons entendu la CGPME et le Medef, ou lorsque nous avons reçu les contributions des syndicats. Un délit pénal lorsque les chefs d'entreprise révèleront des données fiscales, des risques de discrimination salariale si l'on considère qu'il n'y a pas d'augmentation du fait du taux d'imposition... C'est absurde !

Le rapport examine effectivement les deux autres options. Mais pourquoi parlez-vous de « solution dégradée » à propos du scénario dans lequel ce serait l'administration fiscale qui ferait le prélèvement ? Pourquoi ne pourrait-on pas avoir une évaluation contemporaine des revenus et un système d'acomptes, au lieu de créer des problèmes en introduisant un tiers ? Il n'y a pas de risque d'impayés, puisque, comme vous l'expliquez, le taux de recouvrement spontané en France est très bon. Pourquoi introduire un tiers collecteur, au lieu de conserver une relation simple et bilatérale entre le contribuable et l'administration fiscale ? S'agit-il de préparer autre chose ? Pourquoi la DGFiP n'est-elle plus au coeur du système ?

Prenons le cas concret des réclamations, estimées à 200 000 chaque année. Comment le remboursement d'une personne ayant effectué une demande gracieuse après avoir été prélevée se passera-t-il ? Y aura-t-il ajustement sur d'autres impositions, ou une modification du taux de prélèvement à la source ?

On nous dit que l'intérêt de la réforme est de tenir compte des évolutions de revenus et de situation. Or la naissance n'est pas prise en compte de manière automatique. Est-ce une erreur ? Pourquoi n'y a-t-il pas adaptation automatique du taux ?

L'année de transition est une question compliquée. Certes, même avec un système de prélèvement par l'administration, il y aura une année de transition. Mais pourquoi ne pas avoir fait au plus simple en retenant une moyenne de revenus pour évaluer les éventuels abus ? On entre dans le coeur des contrats de travail, pour retenir les rémunérations qui sont exceptionnelles ou pas et évaluer si le contribuable a cherché à optimiser son imposition. Je suis inquiet : on modifie le délai de reprise fiscale. Retenir la moyenne des revenus perçus serait plus simple pour apprécier les cas d'optimisation et permettrait de régler le problème de l'année de transition.

J'ai bien compris votre souci, très légitime, de maintenir un dispositif d'incitation à la réalisation de travaux dans des immeubles loués en 2017, faute de quoi on assisterait à un effondrement du secteur économique. Mais pourquoi avoir limité la déductibilité à 50 % du montant des travaux en 2017 ? Concrètement, pour une copropriété qui ferait des travaux en 2017 et pas en 2018, seulement la moitié du montant des travaux sera prise en compte. Les conséquences sur l'activité économique dans le bâtiment seraient très défavorables.

Le taux par défaut pour lequel le contribuable peut opter est par définition assez défavorable, puisque c'est le taux d'un célibataire sans enfant. Le barème qui risque, de plus, de créer des effets de seuil, pourrait-il être révisé ?

Personne ne peut se satisfaire du système actuel, basé sur les revenus de l'année N-1. Mais pourquoi avoir introduit les entreprises dans le dispositif ? Certaines PME font encore des bulletins de paie à la main. Il y a des problèmes de responsabilité et de confidentialité.

Pourquoi ne pas avoir fait le prélèvement par l'administration fiscale sur la base d'une imposition contemporaine, en utilisant la DSN, notamment pour les revenus salariés ? La DSN, nous dit-on, risque de ne pas être prête pour toutes les entreprises en 2017. La réforme ne serait-elle donc pas prématurée ? Est-on en mesure d'effectuer ce prélèvement au 1er janvier 2018 ?

Je ne conteste pas le principe d'une imposition contemporaine. Mais je ne vois pas l'intérêt d'écarter la DGFiP, qui fait bien son travail par ailleurs, et d'introduire les entreprises comme tiers collecteurs.

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