S'agissant de l'évolution de la sinistralité en matière d'accidents du travail, nous observons effectivement un palier après des chutes très importantes ces dernières décennies. Pour mémoire, on compte 34 accidents du travail pour 1000 salariés aujourd'hui, soit dix fois moins qu'il y a cinquante ans. La France connaît une évolution comparable à celle des autres pays en Europe. L'Allemagne se situe légèrement en-dessous, comme le montrera notre prochain rapport de gestion. Le nombre d'accidents de trajet est étroitement lié à la présence ou non d'hivers rigoureux et à l'évolution de la politique de sécurité routière, sur laquelle notre branche n'a pas de prise.
Le poids des rentes est très important dans les dépenses de la branche. Si les dépenses liées à l'amiante diminuent, les TMS représentent 87 % des maladies professionnelles reconnues.
Je reconnais qu'il existe un problème de méthodologie pour calculer le montant de la sous-déclaration. Cette question est très complexe et des travaux sont en cours à l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) et à l'ex-Institut de veille sanitaire (InVS), aujourd'hui intégré à Santé publique France, pour avancer sur ce sujet d'ici le premier semestre 2017. J'ajoute que la sous-déclaration ne concerne pas tant les accidents du travail que les maladies professionnelles, car ces dernières doivent être déclarées non par l'employeur mais par l'assuré. Nous suivons actuellement une cohorte de personnes souffrant de mésothéliome et nous constatons que tous ne demandent pas la reconnaissance en maladie professionnelle, alors que le lien avec l'amiante ne fait aucun doute. Il n'est pas simple pour des personnes malades et retraitées de monter un dossier de reconnaissance de maladie professionnelle, pour des raisons aussi bien techniques que psychologiques. C'est pourquoi nous avons sensibilisé récemment des personnes souffrant d'un cancer de la vessie et prises en charge par l'assurance maladie au titre des affections de longue durée (ALD), pour leur indiquer que cette maladie était souvent en lien avec l'environnement professionnel et qu'elles pouvaient demander conseil à leurs médecins en vue de faire les démarches permettant d'obtenir une rente. Cette campagne de sensibilisation a porté ses fruits puisque les demandes de reconnaissance ont été multipliées par six.
S'agissant du problème de la facturation des hôpitaux, il est en grande partie résolu car celle-ci est intégrée dans les logiciels de PMSI, si bien que les régularisations se font automatiquement. L'imputation du risque est exacte. En revanche, nous avons toujours des difficultés pour individualiser et imputer les dépenses qui nous concernent.
J'en viens à la question des économies de gestion demandées à la branche. Elles sont mutualisées au sein de la Cnam et il n'y a pas de spécificités de la branche AT-MP, même si nos agents sont répartis entre les CPAM et les CARSAT. Cependant, on ne peut pas réaliser les mêmes gains d'économies au sein de la branche AT-MP qu'au sein de la branche maladie. La reconnaissance d'une maladie professionnelle prend du temps car il faut mener une enquête au cas par cas. Comme en matière de prévention, on ne peut pas augmenter indéfiniment les économies de gestion.
Contrairement à une idée longtemps répandue, les maladies psychiques d'origine professionnelle sont reconnues depuis longtemps. Le flux de demandes n'a pas explosé ces dernières années, en revanche le nombre de cas reconnus a augmenté car de nombreux freins administratifs ont été levés au niveau de la saisine des CRRMP. Il fallait par exemple que l'état de santé du demandeur soit consolidé avant la saisine, ce qui était très compliqué car l'état psychique évolue en permanence : nous avons remplacé cette notion par une appréciation de la gravité potentielle de la pathologie. C'est pourquoi une demande sur deux environ aboutit désormais à une reconnaissance, soit plus de 400 cas en 2015. En tant que médecin, j'ai pu assister à des réunions de comités et constater que les dossiers étaient très lourds et compliqués. Dans un grand nombre de cas, les demandeurs ont auparavant formé un recours devant le conseil de prud'hommes à la suite d'un licenciement.
S'agissant de la prise en charge de ces pathologies au titre des accidents du travail, nous ne disposons pas de données précises faute de codage, la dernière étude sur des bases médicales remontant aux années 2008 et 2009 : les accidents du travail représentaient alors 1% du flux des incapacités permanentes. Je souhaite toutefois actualiser cette étude.