Je me réjouis d'être avec vous pour la cinquième année consécutive, pour présenter le dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) de ce quinquennat. Vous avez abordé les recettes avec M. Christian Eckert. Je ne m'attarderai pas sur les équilibres financiers, même si j'en suis responsable - c'est l'un des points essentiels de la répartition des compétences au sein du Gouvernement : il n'y a pas d'un côté le responsable des recettes et de l'équilibre, et de l'autre la ministre chargée des dépenses, très vite considérée comme la ministre dépensière. Être responsable de l'engagement des dépenses et de la bonne tenue des comptes est de nature à apporter des garanties à nos concitoyens. Même s'ils ne sont pas au fait des données comptables, ils sont attentifs à l'équilibre des comptes de la sécurité sociale parce que celui-ci renferme une vision de l'avenir. En le rétablissant, nous envoyons un message aux plus jeunes générations : nos petits-enfants ne financeront pas nos retraites ni notre santé.
En 2011, le régime général était en déficit de 17 milliards d'euros. Le déficit sera de 3,7 milliards d'euros cette année et de 400 millions d'euros en 2017, sur près de 500 milliards d'euros de dépenses. Cela peut être analysé comme un retour à l'équilibre. Le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) est stabilisé ; en raison du chômage, il reste en déficit, mais celui-ci n'augmente pas. La dette de la Caisse d'amortissement de la sécurité sociale (Cades) et de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) se situera en deçà de son niveau de 2011. Depuis 2014, nous réduisons la dette accumulée depuis des années. Plusieurs rapports, dont celui du Conseil d'orientation des retraites, montrent que le rétablissement des comptes s'inscrit dans la durée. C'est le cas pour l'ensemble des branches. Le déficit de la branche maladie, qui persiste, sera considérablement réduit. Quant à la branche vieillesse, elle dégage plus d'1,5 milliard d'excédent.
Nous avons poursuivi ce travail d'exigence avec la conviction que l'équilibre de la sécurité sociale n'est pas l'ennemi des droits sociaux. C'est pourquoi j'ai défendu l'inscription de droits nouveaux en matière de santé, de famille ou de retraite. En 2017, nous nous inscrirons dans le prolongement de l'action menée en matière de retraites, avec une mesure significative : faciliter la transition entre emploi et retraite en élargissant le droit à la retraite progressive aux salariés qui ont plusieurs employeurs.
L'équilibre de la branche famille sera rétabli l'an prochain. Dans ce domaine, nous poursuivons le soutien aux familles en difficulté, en particulier celles qui sont confrontées à des séparations. Depuis le 1er avril, nous avons généralisé la garantie contre les impayés de pensions alimentaires, de 100 euros par enfant. Lorsqu'une femme -c'est majoritairement le cas- est confrontée à un ex-conjoint défaillant dans le paiement de la pension alimentaire, elle peut demander à la Caisse d'allocations familiales (CAF) d'agir à sa place. La CAF se retourne vers le père avec des moyens infiniment supérieurs à ceux d'une femme seule, fragile et sans connaissances juridiques. Nous élargissons ce dispositif avec la création d'une agence nationale de recouvrement des impayés de pensions alimentaires.
En matière de protection sociale des indépendants, nous optimisons le recouvrement des cotisations par les Unions de recouvrement pour la sécurité sociale et les allocations familiales (Urssaf) et le Régime social des indépendants (RSI) et améliorons la couverture retraite d'une partie des professions libérales non réglementées, qui pourront aussi bénéficier d'indemnités journalières.
Nous poursuivons également notre action de transformation engagée par la loi de modernisation de notre système de santé.
Nous donnons la priorité à la prévention en renforçant la politique de réduction des risques, notamment pour les usagers de substances psychoactives. Les missions des centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogue (Caarud) seront élargies pour qu'ils puissent dispenser des médicaments en lien avec leur action.
Nous poursuivons la lutte contre le tabagisme en alignant la fiscalité applicable au tabac à rouler, porte d'entrée des jeunes dans le tabac en raison de son prix inférieur aux cigarettes, sur celle applicable à ces dernières. Nous mettons en place une contribution sur le chiffre d'affaires des fournisseurs agréés par les fabricants de tabac, qui alimentera le fonds de lutte contre le tabagisme. Le PLFSS contient également des dispositions de prévention en matière de santé mentale des plus jeunes.
Ce projet de loi consacre une nouvelle étape de notre soutien à l'innovation. L'accélération de l'innovation thérapeutique est un défi lancé à l'ensemble des systèmes de santé dans le monde - nous l'avons évoqué lors du G7 Santé, au Japon. Nous inventons de nouvelles manières de prendre en charge l'innovation.
Nous mettons en place, dans ce PLFSS, des mécanismes de régulation et un financement approprié pour amortir les dépenses d'innovation. Nous renforçons la capacité pour l'assurance maladie de négocier les prix en sortie d'autorisation temporaire d'utilisation (ATU) pour mettre fin au déséquilibre entre les laboratoires et les pouvoirs publics. Nous créons et dotons un fonds de financement des innovations qui lissera dans le temps l'impact des variations de la dynamique des nouveautés thérapeutiques. Il ne s'agit pas seulement du médicament. Ainsi, 670 millions d'euros seront investis dans douze plateformes haut débit de séquençage du génome dans notre pays. L'enjeu, c'est la médecine personnalisée, adaptée au capital humain de chacun - une perspective passionnante.
Le PLFSS continue de soutenir l'accès aux droits pour tous. La Protection universelle maladie (PUMa), mise en place cette année, sera renforcée pour protéger des ruptures de droits ceux qui changent souvent de situation professionnelle, notamment les travailleurs saisonniers.
J'en viens à l'accès aux soins. La part des dépenses de santé supportées par les ménages a baissé pour la quatrième année consécutive. Alors qu'en 2011, 9,3 % des dépenses de santé restaient à leur charge, cette part s'établit, en 2015, à 8,4 %, niveau historiquement bas, record des pays de l'OCDE. Et ce, grâce à l'augmentation de la prise en charge par l'assurance maladie et non par les complémentaires, ce qui aurait été à l'opposé de mes convictions. Le tiers payant s'installe dans notre paysage, mois après mois, à bas bruit, comme les statistiques en témoignent.
En 2017, je souhaite aller plus loin en assurant une meilleure prise en charge des soins dentaires, qui restent trop coûteux pour une partie de nos concitoyens. Nous n'avons pas pu nous y engager auparavant, en raison du déficit de l'assurance maladie. Notre but est de réduire le coût pour les patients en plafonnant le prix des prothèses, en échange d'une revalorisation de certains soins conservateurs. Ce plan passe par un réinvestissement important, pluriannuel, de l'assurance maladie obligatoire. D'un côté, les prix baisseront, de l'autre, la prise en charge augmentera. Des négociations conventionnelles ont été ouvertes. J'espère qu'elles se poursuivront fructueusement, faute de quoi le Gouvernement prendra ses responsabilités.
Des moyens supplémentaires pour notre système de santé sont inscrits dans ce PLFSS en reconnaissance de l'engagement des professionnels, qui, par leur exemplarité, nous ont aidés à atteindre la situation financière actuelle. Grâce à leurs efforts, l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) a été respecté, année après année, alors même qu'il était parfois renforcé en cours d'exécution. En 2017, l'Ondam progressera de 2,1 %. Pour que cet objectif exigeant soit tenu, le niveau d'économies doit être très élevé : plus de 4 milliards d'euros en 2017. L'Ondam financera des mesures actées dans la convention médicale entre l'assurance maladie et les professionnels libéraux. Concrètement, l'Ondam de la médecine de ville est supérieur à l'Ondam hospitalier, à 2,1 % contre 2 %. Ce dernier accompagne les réformes engagées dans le cadre des groupements hospitaliers de territoire (GHT) telles que la revalorisation du point d'indice et l'augmentation salariale des infirmiers et des soignants de catégorie C, de 250 à 500 euros par an selon le grade et la catégorie. Il favorise l'investissement hospitalier, de 250 millions d'euros en 2017.
Nous pourrons aborder les engagements médico-sociaux, objets d'un effort financier de 590 millions d'euros supplémentaires en 2017 pour la création de places destinées aux personnes en situation de handicap ou aux personnes vieillissantes exposées à la dépendance. Nous pourrons également évoquer la branche accidents du travail - maladies professionnelles.