Les référentiels reconnaissent et distinguent les techniques traditionnelles et les techniques courantes, qui seules sont admises par les assureurs. Les techniques courantes comprennent à la fois les techniques traditionnelles et les innovations, qui doivent toutefois être validées formellement. La documentation professionnelle établie par les acteurs constitue un référentiel de construction partagé, qui rassemble les règles de l'art et s'enrichit constamment des retours d'expérience.
Pour les ouvrages de construction, le référentiel le plus répandu auprès des entreprises est le document technique unifié (DTU), dont on commence à prendre conscience qu'il doit être adapté aux spécificités ultramarines. À la fin des années 1990, 90 % des DTU excluaient les outre-mer de leur champ d'application, ce qui posait un problème d'assurance. En 1999, le Groupe de coordination de normalisation du bâtiment (GCNorBât) avait imaginé un DTU complémentaire au DTU « métropole », mais cette idée n'a jamais été mise en oeuvre, faute de données suffisantes pour constituer un référent. Un gros travail a également été effectué aux Antilles sur les règles professionnelles dans les années 1990. La consultation réalisée par la Délégation sénatoriale à l'outre-mer aura eu le mérite de relancer les démarches puisqu'une réunion se tiendra cet après-midi entre Bernard Siriex, président de la Fédération Réunionnaise du Bâtiment et des Travaux Publics (FRBTP), Stéphane Brossard, président de la commission technique, Aurélie Ichard, animatrice technique, nous-mêmes et le Bureau de normalisation des techniques et équipements de la construction (BNTEC). Nous nous demanderons comment recenser les DTU qui posent problème, et comment y introduire des annexes spécifiques aux outre-mer.
Le domaine d'application de l'avis technique est défini par le fabricant demandeur, lorsqu'il innove par rapport au DTU. Cet avis est instruit par la Commission chargée de formuler les avis techniques (CCFAT) pour le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB). Si le demandeur n'inclut pas l'outre-mer dans le champ de l'avis technique, l'application outre-mer est impossible. S'il l'inclut, des essais complémentaires sont à faire, pour tenir compte des conditions climatiques parfois exceptionnelles, liées aux cyclones, à la pluviométrie ou à l'humidité. Il y a peu d'avis techniques intégrant les conditions climatiques d'outre-mer. Dès lors, peu d'innovations sont validées pour une application outre-mer. À l'inverse, nous n'avons pas connaissance de demandes de fabricants ultramarins visant à obtenir un avis technique pour le marché métropolitain.
La réalisation outre-mer d'un ouvrage non couvert par un DTU impose de faire valider les éléments complémentaires, c'est-à-dire ceux qui ne figurent pas dans le référentiel des techniques courantes. Cela prend plusieurs mois, et impose un déplacement en métropole. Les déclarations de performance des matériaux étant conçues en fonction des conditions climatiques européennes, il est très difficile de faire reconnaître des matériaux non européens. Et il n'est pas simple d'identifier sur place les acteurs susceptibles de réaliser les tests et de valider ces matériaux.
Le Programme d'action pour la qualité de la construction et la transition énergétique (PACTE), lancé en 2014, à la suite des travaux du programme « Règles de l'art Grenelle environnement » (RAGE) prévoit un groupe de travail dédié aux départements et régions d'outre-mer. Les actions destinées à l'outre-mer comprennent une révision des « règles de l'art Antilles » rédigées en 1992 et 1996 et devenues obsolètes, l'adaptation de certains DTU métropolitains et la rédaction de règles de l'art sur des systèmes de production énergétique adaptés. En revanche, les travaux de révision des textes réglementaires dits « RTAA » (Réglementation thermique, acoustique et aération) et sécurité incendie pour les établissements recevant du public (ERP) ne peuvent être effectués dans ce cadre car ils sont de nature réglementaire.