Intervention de Évelyne Didier

Réunion du 19 octobre 2016 à 22h30
Eau et milieux aquatiques — Débat sur les conclusions de deux rapports d'information

Photo de Évelyne DidierÉvelyne Didier :

Nous pensons également qu’il est utile de privilégier des solutions locales pour associer l’ensemble des acteurs à la concertation.

Dans sa contribution annexée au rapport de la délégation à la prospective, l’Association des maires de France signale, à juste titre, la difficulté née de la réforme territoriale, qui impose un cadre territorial et administratif, alors que les élus locaux prônaient une rationalisation des services de l’eau et de l’assainissement.

Il faut absolument prendre en compte les facteurs physiques géographiques de la qualité et de la proximité de la ressource en eau.

Pour ce qui concerne la gestion quantitative de l’eau, vous avez raison, monsieur Lozach, la ressource ne se crée pas, elle se gère ! Or l’état des réseaux est préoccupant : 25 % de l’eau prélevée n’arriverait pas à l’usager et, dans certains secteurs, ce pourcentage est encore plus élevé. Connaître les réseaux, les réparer et les entretenir entraîne des coûts, que les collectivités ne peuvent pas supporter seules.

Et si la vente d’eau génère des bénéfices, alors ceux-ci doivent financer ce qui, pour nous, doit être un service public !

Nous sommes évidemment favorables à un soutien financier aux collectivités pour financer l’assainissement et lutter contre les fuites sur les réseaux d’eau potable, ainsi qu’à la mise en place d’un plan d’action visant à acquérir une connaissance approfondie de ces réseaux, afin de rechercher et réparer les fuites ou renouveler les conduites.

Je dirai maintenant quelques mots sur ce qui, à mon sens, manque dans les propositions.

D’une part, les rapports évoquent la question des pollutions diffuses. À ce sujet est cité le rapport d’évaluation de la politique de l’eau établi par Anne-Marie Levraut au mois de septembre 2013 et rappelé que la moitié des masses d’eau sont dégradées du fait de pollutions diffuses d’origine agricole : utilisation de nitrates ou de pesticides. Mme Levraut concluait son rapport par cette phrase : « L’enjeu est de passer d’une multitude d’actions curatives à une approche préventive cohérente et à la bonne échelle, tirant ainsi les conséquences de la reconnaissance d’un cycle de l’eau unique au bénéfice de tous les usages. »

Mais voilà, les propositions qui devraient en découler restent timides. Certes, des progrès doivent être relevés, comme en témoigne l’application de la directive Nitrates, mais on constate également des rendez-vous manqués.

Un exemple récent : lors de l’examen du projet de loi relatif à la biodiversité, le parlement français n’a pas voulu interdire la culture des plantes tolérantes aux herbicides. Pourtant, dès 2011, un rapport de l’Institut national de la recherche agronomique, l’INRA, et du Centre national de la recherche scientifique, le CNRS, sur cette question, commandé par les ministres de l’agriculture et de l’écologie, notait que l’emploi de ces variétés tolérantes aux herbicides conduisait mécaniquement à des teneurs plus élevées des molécules chimiques dans les eaux et augmentait le risque d’atteindre les taux limites réglementaires pour la potabilité.

D’autre part, le rapport de la délégation à la prospective note à propos de l’eau virtuelle, c’est-à-dire la quantité d’eau nécessaire pour produire des biens de consommation, que « c’est une notion importante, car elle est de nature à modifier les ordres de grandeur du commerce international » et que la négliger reviendrait à déplacer nos problèmes sur les pays qui sont déjà en difficulté. Nous sommes en accord avec cette affirmation. L’économie mondialisée déplace effectivement nombre de problèmes vers les pays les plus pauvres et les populations les plus vulnérables. C’est la raison pour laquelle il faut développer une économie circulaire de proximité, respectueuse, de fait, de l’environnement et des hommes. L’économie de l’eau en est le cœur.

Enfin, je regrette que le droit à l’eau pour les plus démunis n’ait pas été évoqué dans les rapports. Tout le monde n’a pas accès à l’eau potable en France. C’est une réalité que nous devons combattre avec détermination.

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