Intervention de Jean-François Carenco

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 26 octobre 2016 à 9h30
Grand paris — Audition de M. Jean-François Carenco préfet de la région d'île-de-france

Jean-François Carenco :

Pour répondre à Louis Nègre, on a la nécessité d'aller vite avec aussi l'aiguillon des Jeux Olympiques. Sur CDG Express, notre ambition est d'ouvrir en 2023. On le voit, avec la métropolisation au sens où je vous l'ai présentée et dans son mode de gouvernance, ce n'est pas chacun chez soi, ni les collectivités territoriales contre l'État. Pourquoi redémarre-t-on un peu plus vite ? C'est que tout le monde s'est dit que dans la crise, il n'y a qu'ensemble qu'on peut le faire. Du temps où j'étais directeur de cabinet de Jean-Louis Borloo, j'ai raté CDG Express. Le dossier a été repris et je l'ai pris en route maintenant. On a rassemblé la SNCF, Aéroports de Paris, l'État, la Caisse des dépôts. Globalement, il n'y a pas eu beaucoup de difficultés. On relance Éole et toutes les collectivités territoriales ont accepté de payer pour avoir un des réseaux les plus modernes du monde. Cela fait vingt ans que l'on parlait de ce projet. La recette du succès était de s'y mettre ensemble. Pour le financement de CDG Express, on avait deux possibilités : soit la captation de la rente foncière, ce qui était le projet initial mais qui a été abandonné, soit une taxe affectée qui peut durer jusqu'en 2071.

La rente foncière existe toujours et donc les projets de qualité renaissent. Il y a un endroit où je voudrais capter la rente foncière au profit des communes de manière indirecte. On va enterrer des lignes du réseau RTE. Nous demandons aux collectivités territoriales de payer ces lignes qu'on change pour trouver de l'espace mais en échange elles capteront la rente foncière. Les terrains deviennent constructibles et permettent de développer des zones d'activité et de logement.

La ligne entre Paris et l'aéroport Charles-de-Gaulle, avec un train toutes les vingt minutes, est un transport qui coûte assez cher, avec un billet à 24 euros, mais je pense que les 110 000 salariés de la zone y auront peut-être droit. La question du lien entre les aéroports et les grandes capitales est un problème dans tous les pays du monde. À Nice, la question ne se pose pas car l'aéroport est en ville pratiquement.

Pour répondre à la question de Madame Tocqueville sur l'axe Seine Rouen-Le Havre, j'ai envie de dire qu'il faudrait que vous essayiez d'abord de vous entendre entre vous. Ce n'est pas une bonne chose qu'il n'y ait pas un port unique entre Rouen et Le Havre. Il ne faut pas non plus assécher Caen et Ouistreham. Il faut dire clairement que Rouen-Le Havre, ce n'est pas contre Caen. Il faut que la région Normandie arrive à agréger les grandes conurbations entre elles sans qu'elles se battent. L'idéal-type c'est un port Paris-Rouen-Le Havre. Depuis Napoléon Ier, Paris va jusqu'à la mer. On n'y est pas encore arrivé mais c'est une évidence qui arrivera.

Madame Didier, ce que j'ai voulu dire sur l'énergie, c'est que le modèle de l'énergie centralisée était derrière nous. Or, c'est la lutte pour l'énergie centralisée qui a mené le monde. L'énergie sera produite maintenant de manière tellement décentralisée que je pense qu'elle ne sera plus un sujet. Sur l'industrie lourde, j'ai bien dit qu'en Ile-de-France, l'industrie aéronautique se portait bien, ainsi que l'armement. J'entendais en réalité la production d'acier par exemple. On ne peut pas faire comme si l'Afrique et l'Asie devaient éternellement mourir de faim. On ne peut pas faire comme si il fallait de moins en moins de main d'oeuvre pour produire de plus en plus. L'augmentation de la productivité est gigantesque. J'ai rencontré récemment une start-up au Centquatre-Paris qui a réussi à domestiquer des vers à soie. Ils ne filent plus la soie : le ver, directement, au lieu de faire un cocon, fait du tissu, des objets, etc. Adieu les filatures !

Il nous faut réinventer non pas la survivance des emplois qui n'existent plus mais des activités qui créent de l'emploi et de la richesse. Alors évidemment, il restera toujours de l'industrie lourde.

Vous m'interrogez aussi sur la mixité sociale. Je suis fier qu'en région Ile-de-France, le nombre de communes carencées diminue. Cela veut dire qu'elles ont rempli leur obligation de construction de logement social. Sur les 80 000 logements autorisés en 2016 - je crois le plus haut chiffre depuis 1974 - je ne désespère pas d'arriver à plus de 35 000 logements sociaux en Ile de France, avec deux critères à regarder : leur répartition sur le territoire et leur répartition entre les trois types de logements sociaux, prêt locatif social (PLS), prêt locatif intermédiaire (PLI), prêt locatif aidé d'intégration (PLAI). Je suis content que le Comité régional de l'habitat et de l'hébergement la semaine dernière, sous la co-présidence de Geoffroy Didier et de moi-même, ait accepté que le texte soumis à la consultation précise que le nombre de PLAI doit être en augmentation d'une année sur l'autre. En 2015, année de référence, nous étions à 25,2% de PLAI.

Dernier point sur les régions et la démocratie. À ce stade, la loi Notre a institué la métropole. La question est posée : fallait-il le faire ou non ? Chacun sait que cette loi a produit une métropole qu'il faudra sans doute modifier. C'est une version zéro de ce qu'il faut faire. Pour l'instant j'estime qu'il faut laisser émerger les choses dans la période de construction, qu'il faut faire la métropole même avec son degré de défaut. La copie devra évoluer. Sur ces sujets, on ne peut pas faire des choses parfaites du premier coup. Pour cela, il faudrait le faire par ordonnance, ce qu'on a fait à Lyon, par accord entre l'État, la communauté urbaine et le département. Mais à Lyon, on avait une communauté urbaine qui avait cinquante ans d'âge. En outre, on ne traite pas les institutions de la capitale par ordonnance.

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