Intervention de Hélène Fauvel

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 26 octobre 2016 à 11h05
Plf pour 2017 — Projet d'instauration du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu - Audition de M. Alexandre deRigny secrétaire général adjoint de la cgt finances Mme Hélène Fauvel secrétaire générale de fo-dgfip M. François-Xavier Ferrucci secrétaire général de solidaires finances publiques M. Gabriel Grèze secrétaire général de la cfdt finances publiques

Hélène Fauvel, secrétaire générale de FO-DGFiP :

Force ouvrière est également, pour des raisons historiques et philosophiques, opposée au système de prélèvement à la source. Dès 1966, le ministre des finances Michel Debré avait lancé une étude et créé une commission présidée par Jacques Chirac, secrétaire d'État à l'économie et aux finances, afin de rendre des conclusions sur la possibilité d'un tel système. Les évènements de mai 1968 ont mis un terme à cette étude puisque l'article 11 des accords de Grenelle prévoyait qu'il ne serait pas proposé d'assujettir les salariés au régime de la retenue à la source. Cette problématique est donc un « serpent de mer » qui ré-émerge périodiquement au gré des évènements politiques.

Pourquoi vouloir ainsi changer un système qui fonctionne bien ? Certains indicateurs sont le reflet de ce bon fonctionnement, comme le taux de recouvrement, le taux de dématérialisation du paiement de l'impôt sur le revenu, le nombre de contribuables mensualisés ou le nombre de contribuables qui paient à l'échéance. Ces bons indicateurs nous donnent l'impression que cette réforme n'est pas justifiée.

Elle ne simplifiera, en outre, pas le système. Les contribuables auront deux interlocuteurs contre un seul aujourd'hui, comme l'a précisé Alexandre Derigny, alors que la fusion de la direction générale des impôts et de la direction générale de la comptabilité publique avait justement pour but de le placer face à un interlocuteur unique.

Cette réforme est également synonyme d'un risque réel pour les recettes de l'État. Mon expérience de membre de la commission financière de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), où j'ai représenté la confédération Force ouvrière, me montre que certaines entreprises oublient parfois de reverser les cotisations sociales qu'elles doivent. Des défaillances similaires en matière d'impôt sur le revenu seraient, en ce sens, dommageables pour les recettes de l'État.

La contemporanéité de l'impôt ne sera pas non plus acquise pour tous les salariés. C'est notamment le cas pour ceux qui opteront pour le taux neutre d'imposition afin de ne pas porter à la connaissance de leurs employeurs certains aspects des situations de leurs foyers fiscaux. Ces salariés s'exposeront, de facto, à des régularisations postérieures en fonction de leurs taux réels d'imposition.

Un risque de déport existe également en matière de revendication salariale des employés. Ils seront, en effet, en mesure de constater l'impact effectif de la variation de leur salaire sur les sommes qu'ils percevront réellement en fin de mois. Si je ne partage pas spécialement les idées de Pierre Gattaz, je souscris ici à son analyse récente à ce sujet.

Un autre risque réel réside dans la désorganisation des services des finances publiques par le transfert de la charge de travail des services des impôts des particuliers (SIP) vers les services des impôts des entreprises (SIE). Je rejoins, à cette occasion, le constat relatif au niveau annuel de suppressions d'emplois et à la situation de nos services, en particulier celle des services d'accueil primaire. Lorsque des erreurs surviendront, c'est en premier lieu vers ces services que s'orienteront les contribuables surpris du manque de simplicité du système.

Je tiens aussi à souligner que cette réforme n'est pas celle qui était attendue par les français afin de rendre l'impôt sur le revenu plus juste, plus progressif et plus équitablement réparti. Le principe d'égalité devant l'impôt et le pacte républicain se trouvent au contraire mis à mal puisque les contribuables ne seront pas imposés de la même manière en fonction de la nature de leurs revenus.

Il s'agit pour nous, en dernier lieu, d'une privatisation rampante de la collecte de l'impôt vers des tiers non-certifiés.

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