Je me félicite que nous ne nous restions pas dans la nostalgie. Nous entrons dans une véritable révolution ; le numérique et la dématérialisation modifient les services tels que nous les connaissions.
S'agissant des inquiétudes des communes rurales, il faut reconnaître qu'il existe une large part de ressenti, dû en grande partie aux réformes territoriales successives qui ont, à mon avis, éloigné le citoyen de ses centres de décision. Il n'y a plus de conscience des réalités ; même la crédibilité de l'intercommunalité est remise en cause sur le terrain.
Admettons également un problème de moyens : l'ingénierie ne relève plus exclusivement de l'État, puisqu'elle est reprise en partie par les collectivités et le secteur privé. Or, dans les territoires ruraux, il n'y a plus de masse critique pour la faire vivre.
Le coeur du sujet est la nouvelle césure entre les services de l'État, les collectivités territoriales et le privé. L'échelon privilégié de l'ingénierie est à mes yeux le département. À ce niveau, trois acteurs sont impliqués : les départements, les intercommunalités - davantage que les communes - et l'État. Or le contenu de la solidarité territoriale n'a pas été défini. Les intercommunalités et départements s'interrogent sur la répartition des compétences : dans mon département, la Haute-Marne, l'eau et l'assainissement doivent aller aux intercommunalités, mais les compétences sont au niveau des services départementaux. Il conviendrait de constituer un syndicat départemental où seraient reversés les personnels compétents. Or ce n'est pas ce qui se fait.
L'État donne l'impression d'avoir des préoccupations existentielles, mais de négliger son rôle de pilote, comme pour ce qui est des schémas d'accessibilité, auxquels les intercommunalités auraient dû être associées. En l'état, tout blocage d'une des parties compromet l'avancée des travaux, et le cas se produit souvent. Pour avancer dans la mise en place de l'ingénierie, il faut redéfinir la notion de solidarité territoriale, mettre en place une nouvelle culture et réunir les acteurs autour d'une table.